Les New York Yankees : un 28ème titre ?

Après le marasme et la déprime de l’hiver 2020 accouchant d’une pandémie mondiale et d’une saison MLB raccourcie façon premier lavage à 60°C, TSO revient aux sources et à ses premiers amours : l’écriture. Et si pour le commun des mortels, l’arrivée du printemps signifie l’éclosion des bourgeons et les premiers chants d’oiseaux, pour la grande famille du baseball, printemps rime avec entraînement. Celui du spring training, des premières sorties avec de nouvelles couleurs pour certaines stars et de vieilles retrouvailles avec des rosters déjà bien armés pour d’autres. Que l’on soit fan de la petite balle blanche ou non, le printemps signifie surtout la préparation, le devenir. Et sans révolutionner votre quotidien, The Strike Out vous apporte son brin d’espoir : les fameuses 30 franchises en 30 jours. Aujourd’hui, TSO débarque dans la Grosse Pomme pour parler de LA franchise du baseball, aussi aimée que haïe, visant le titre chaque saison, les célèbres et glorieux New York Yankees

Retour sur 2020 : What’s up doc’ ?

Quelle saison 2020 ! Comme tous les ans, ou presque, depuis le dernier titre obtenu en 2009, les New York Yankees font partie des favoris au titre suprême. Avec la signature de Gerrit Cole (36 millions de dollars par an / 9 ans) et un roster des plus sexy, les projections des spécialistes plaçaient l’équipe en position très favorable pour décrocher leur 28ème titre. Et pourtant…

Et pourtant, la saison a été loin d’être un long fleuve tranquille de 60 matchs. Il faut dire que les Yankees ont été marqués par la poisse ou plutôt par une série impressionnante de blessures qui a touché quasiment l’ensemble du roster de l’équipe du Bronx. Après une année 2019 ayant compté pas moins de 30 joueurs placés sur l’Injury List, cumulant 2320 jours d’indisponibilité, l’équipe a continué sur cette (mauvaise) lancée pour accumuler les déboires. Et ce ne sont pas les seconds couteaux qui ont passé du temps en rehab mais bien les têtes d’affiches. Parmi elles, les habitués de l’infirmerie, à savoir Giancarlo Stanton (qui n’aura joué que 23 matchs en 2020 après une saison 2019 à 18 matchs) et Aaron Judge (28 matchs + 7 matchs de postseason). Auxquels, nous pouvons ajouter, dans le désordre : Chapman, Britton, Kahnle, Torres, Paxton, LeMahieu, Severino, Higashioka etc, etc. Ajoutée à cela, la suspension de Domingo German pour une sordide histoire de violences conjugales, qui lui valut une suspension de 81 matchs, et vous obtenez une saison décevante.

Résultat : les Yankees n’ont jamais semblé dans la course à la première place dans une division Est de l’American League où les Tampa Bay Rays ont su profiter de l’irrégularité des new-yorkais et de la faiblesse des autres franchises pour chiper la première place et connaître un magnifique parcours jusqu’aux World Series. Au sein de cette équipe d’éclopés, certains joueurs ont su tirer leur épingle du jeu et s’imposer en leader. On pense, bien sûr, à Luke Voit, le 1B titulaire qui a tenu l’équipe à bout de bras, notamment en août lorsque les stars new-yorkaises étaient sur le flanc. Après une première saison solide, Voit a su step-up pour éviter aux Yankees une très grosse désillusion. Avec un batting average de .277, un SLG de .610 et un OPS de .948, il aura été celui qui aura le plus contribué aux performances de son équipes : leader en Runs (41), en RBI (52) et en HR (22), il aura participé à 56 rencontres sur les 60 de la saison régulière. Avec ses 22 Home Runs, le Home Run King 2020 dominera toute la ligue devant le MVP José Abreu des White Sox (19 HR). Autre joueur sur qui les Yankees peuvent compter, l’indéboulonnable DJ LeMahieu qui, après une saison 2019 de très très haut vol, aura su confirmer, sur 50 matchs, son rôle de leader, en récoltant son deuxième Silver Slugger d’affilée et en conservant sa place de meilleur batteur avec un AVG de .364 (Batting Title 2020 de la MLB). Cette saison raccourcie aura aussi permis à Clint Frazier à s’installer confortablement dans le roster (après une saison 2019 délicate défensivement malgré de très bonnes dispositions offensives) et au jeune lanceur Deivi Garcia de découvrir le très haut niveau dans la starting rotation avec 6 matchs soit 34.1 IP pour un ERA de 4.98. Enfin, au niveau individuel, nous ne pouvons pas passer sous silence l’exécrable saison du catcher dominicain Gary Sanchez, tant défensivement qu’offensivement. Pour preuve, le joueur a obtenu un WAR négatif de -0.6. Il faut dire qu’à la batte, même s’il n’a jamais été un joueur très régulier, cette saison a été particulièrement éprouvante : avec 64K pour 178PA (soit un taux de 36%), Sanchez s’est jeté sur toutes les balles qui se présentaient à lui. Avec un succès très relatif : .147 en AVG, un OBP de .253 et un OPS de .618. Sanchez aura tout de même envoyé la balle au-delà des limites du terrain 10 fois, faisant de lui le 2ème meilleur joueur de l’équipe très loin derrière Voit.

Collectivement, forcément, cette situation a eu, de fait, un impact significatif. Avec un effectif réduit, les Yankees ont cumulé 33 victoires pour 27 défaites, terminant 2ème donc loin derrière les Rays (40-20) et finissant au 10ème rang de la MLB. Cette deuxième place permettant par ailleurs aux Yankees d’affronter (et de vaincre) les Cleveland Indians en Wild Card de l’American League avant de tomber une fois de plus contre ceux qui les auront faits le plus souffrir sur la saison, les Tampa Bay Rays en ALDS (3-2). Au niveau offensif, la saison des Yankees est loin d’être infamante : 4ème en nombre de Runs/games (5.25), 4ème en RBI (301) et 5ème en HR (94) malgré les absences des deux plus puissantes battes que sont Stanton et Judge. Les Yankees sont la 8ème équipe ayant obtenu le moins de K (480) et celle qui a accumulé le plus de BB (251). En revanche, avec un AVG collectif de .247, l’équipe se classe à la 14ème place de la ligue, juste au-dessus de la moyenne (.245). Autre statistique intéressante : le nombre de Double Play. Ici, les Yankees montent sur le podium des équipes ayant concédé le plus de retraits sur double jeu (51) montrant la difficulté collective à placer des joueurs en position de scorer et la forte propension à ne pas réussir à frapper au-delà de l’infield.

Côté Pitching, les absences de Severino et German (complétée par celle de Paxton sur blessure en cours de saison) ont amené Aaron Boone à bricoler sa rotation. Derrière l’ace Gerrit Cole, qui a parfaitement assumé son statut de star (ERA de 2.84 en 12 matchs et 73 manches lancées dont un match complet pour un FIP de 3.89, un K/9 de 11.6), Tanaka s’est relevé d’une saison 2019 délicate pour assurer un ERA de 3.56 plus conforme à son statut. Du haut de ses 37 ans, Happ a également tenu la baraque avec un ERA de 3.47 en 49.1 IP. Derrière, Montgomery (ERA de 5.11) mais surtout Paxton (ERA de 6.64) à son retour de blessure en août ont craqué. Et comme nous l’avons dit plus haut, Boone a lancé dans le grand bain le jeune Garcia qui a plutôt assuré pour ses débuts sur le monticule.

Pour conclure, et sans entrer dans des calculs complexes (dont le baseball est friand jusqu’à l’excès), regardons les résultats 2020 des Yankees en matière de Win Above Average qui détermine la contribution des joueurs se partageant un poste aux performances de leur équipe par rapport au joueur moyen occupant un poste similaire. Qu’y apprend-on ? Que globalement, l’équipe des Yankees se classe en 5ème position avec un WAA de 4.3. Si on regarde plus attentivement, on peut s’étonner de voir que malgré l’apport de Cole sur le monticule, la performance des lanceurs n’est que de 0.2 due notamment à une WAA de -0.8 des RP. Offensivement, les Yankees obtiennent une WAA de 4.1 avec une forte contribution des 2B (1.3 merci DJ Le Mahieu) et des 3B (1.4, merci Gio Urshela)  alors que les postes de receveur (-0.4, coucou Gary) mais surtout shortstop (-0.5) ont plombé l’équipe.

Tanaka blessé, symbole du quotidien des Yankees depuis trois saisons – crédit AP

La saison 2021 : Gérer les blessés pour performer

Que peut-on espérer pour l’année 2021 ? Premièrement qu’elle aille jusqu’à son terme. La saison 2020 aura laissé un goût amer d’inachevé dans les bouches Yankees. Pour cela, le front office a pris quelques décisions radicales, notamment dans le bullpen. Tanaka et Paxton, en baisse de régime depuis deux saisons, n’ont pas été prolongés, le premier retournant au Pays du soleil levant tandis que le canadien retrouve sa franchise de cœur à l’autre bout du continent. Pour les remplacer, le General Manager Brian Cashman est allé dénicher deux joueurs de talent mais très fragiles en la personne de Corey Kluber et Jameson Taillon. Nous reviendrons sur ces deux joueurs plus loin.

La politique du club est claire : faire aussi bien en réduisant la voilure salariale. Profitant de la crise du coronavirus qui aura eu un impact indéniable sur les finances du club, le propriétaire, Hal Steinbrenner, a décidé de limiter les gros contrats tout en sécurisant ceux des meilleurs éléments du club. Premier chantier : DJ Le Mahieu. Après plus d’un mois d’incertitude sur la stratégie adoptée par les Yankees et sur les envies du joueur, les fans ont pu pousser un souffle de satisfaction lorsque le 27 janvier dernier les deux parties ont paraphé un contrat de 6 ans et de 15 millions de dollars l’année. A 32 ans, certains estiment que le pari est risqué. Les fans, en revanche, sont ravis de voir revenir le joueur le plus régulier de l’équipe. Deuxième motif de satisfaction pour les supporters, la signature pour une dernière pige du vétéran et vestige d’une époque newyorkaise révolue depuis longtemps, l’outfielder Brett Gardner, savage parmi les savages. Il aura pour mission de taper quelques Home Runs tout en accompagnant la progression de Clint Frazier appelé à prendre définitivement une place à l’outfield. Toujours avec cette idée – révolutionnaire pour le club new-yorkais – de réduire le payroll, le club n’a pas hésité à ne pas renouveler les contrats des vétérans Happ et Kahnle puis à échanger Ottavino aux Red Sox contre des cacahuètes, trade exceptionnel entre les deux clubs ennemis de la division AL East. Pour les remplacer, en plus de Kluber et Taillon, Cashman est allé chercher O’Day, l’atypique lanceur qui évoluait aux Braves et Justin Wilson en provenance des Mets.

La question est alors de savoir si la mayonnaise new-yorkaise va prendre. Pour cela, l’interrogation principale repose sur la capacité du staff médical à maintenir tout ce petit monde en bonne santé. Compte tenu de l’historique individuel et collectif des joueurs en matière de blessures, il existe des raisons de douter. Mais si, à l’inverse, tout le monde passe à travers les gouttes, le roster des Yankees est peut-être l’un des plus complets et des plus talentueux de toute la ligue. Le pari est risqué mais tentant. Et le front office des Yankees l’a tenté au risque de revenir, une nouvelle fois, bredouille.

Les joueurs à suivre : Corey Kluber et Jameson Taillon à la relance

Paxton et Tanaka non renouvelés, il fallait trouver leurs remplaçants. Le marché des agents libres en lanceurs partants laissait, cette année, pas mal de possibilités. Mais les Yankees, au lieu de tout miser sur une star comme Trevor Bauer ont choisi d’offrir leur chance à deux joueurs talentueux mais à la carrière cahotique que sont Corey Kluber et Jameson Taillon.

Corey Kluber signe pour une saison et 11 millions de dollars. Double tenant du prestigieux Cy Young (en 2014 et 2017 avec les Indians), 3 fois All-Star en 2016, 2017et 2018, Kluber serait aujourd’hui considéré comme l’un des meilleurs lanceurs de la décennie si ses deux dernières saisons n’avaient pas été plombées par les blessures. Le 1er mai 2019, alors qu’il monte pour la 7ème fois de la saison sur le monticule, il est heurté au bras par un line-drive du joueur des Marlins Brian Anderson. Résultat : une fracture du bras qui le tiendra éloigné des terrains jusqu’à la fin de saison, le staff préférant le préserver puisque les Indians n’ont plus d’enjeux à ce moment-là de l’année. Pendant son absence, deux joueurs ont performé à savoir Shane Bieber et Zach Plesac ce qui pousse les Indians à échanger Kluber aux Texas Rangers en décembre de la même année. L’année 2020 est un calvaire pour le lanceur de 32 ans puisqu’après une manche lancée, il ressent une violente douleur dans un muscle de l’épaule. Douleur qui le tiendra à l’écart de la saison écourtée avant d’être libéré de son contrat. Au final, sur les deux dernières saisons, Kluber n’aura lancé que 36 petites manches. C’est donc un pari très risqué pour les Yankees dont l’objectif est de placer le joueur en 2ème position derrière Cole. Seul l’avenir nous dira si ce pari est fructueux ou pas mais il est clair que tous les regards seront tournés vers le monticule lorsque Kluber sera partant.

Autre pari, Jameson Taillon. Joueur très talentueux recruté par les Pirates de Pittsburgh, un an après le recrutement de Gerrit Cole, la carrière de Taillon n’a pas été, jusqu’ici une partie de plaisir. Alors qu’il participe au spring training en 2014 avec son équipe, il ressent une gêne au niveau du coude. Le staff médical préférant jouer la sécurité, Taillon passe sur le billard pour une Tommy John et manque l’intégralité de la saison 2014. La saison 2015 débute par une opération pour une hernie et il ne retrouvera les terrains qu’au début de la saison 2016 en AAA avant d’être enfin appelé chez les Pirates en juin de la même année. Il entame l’année 2017 dans la rotation et plein de confiance quand, en mai, les médecins lui diagnostiquent un cancer des testicules après un examen de routine pour une gêne à l’aine. Après son opération, il montera néanmoins 25 fois sur le monticule présageant une année 2018 complète (32 départs) pour un ERA de 3.20 avec deux matchs complets dont un match sans point. L’année 2019 ne compte que 7 départs pour Taillon puisque celui-ci se blesse au coude avant de subir, en août de la même année sa deuxième opération Tommy John de sa carrière. L’année 2020 est déjà annoncée par les Pirates comme une année blanche pour Jameson Taillon. Comme Kluber, en deux ans, Taillon n’aura lancé que 37 manches avant d’être l’objet d’un trade avec les Yankees qui l’échange contre les prospects Miguel Yajure, Roansy Contreras, Canaan Smith and Maikol Escotto.

Duo de talent mais paris risqués : les Yankees vont-ils faire banqueroute ou rafler la mise ? – crédit : Charles Wenzelberg/New York Post

Les Yankees ont donc décidé d’installer aux postes 2 et 3 de la rotation deux joueurs qui ont, à eux deux, lancé 73 manches en deux ans et qui accumulent les blessures. Une fois de plus, et pour reprendre l’image culinaire, si la mayonnaise prend, cette rotation (à laquelle il faut ajouter Garcia, Montgomery, German et à partir de juillet Severino) pourrait faire de nombreuses victimes chez les adversaires des Yankees.

La star : qui peut prétendre à ce titre aux Yankees ?

A bien y réfléchir, trouver une star aux Yankees pourrait sembler être une chose facile. Mais à y regarder de plus près, l’exercice est plus délicat qu’il n’y parait. Aaron Judge devrait revêtir ce costume tant le joueur possède toutes les qualités pour être dans le top 5 des meilleurs joueurs de l’American League. Mais un physique bien trop fragile plombe le joueur et ne deviendra une star que lorsqu’il pourra répéter ses performances sur une saison complète. Même histoire pour Stanton dont la course au titre de star parait être derrière lui. A 31 ans et occupant un rôle de D.H., sauf à sortir une saison à .300 et 50 HR, peu de chances de faire du joueur LA star des Yankees. Tant que Gleyber Torres sera positionné en short-stop, le joueur devra lutter contre quelques démons défensifs avant d’atteindre ce statut. La signature de LeMahieu en 2B lui barrant la route pour l’instant. LeMahieu, justement, joueur le plus solide et le plus prolifique des Yankees depuis deux saisons pourrait être considérée comme LA star de l’équipe. Mais il n’est ni Arenado, ni Trout ou Yelich et sa discrétion sur le terrain comme en dehors de celui-ci rend difficile l’attribution du titre de star.

Gerrit Cole ? Oui, en effet, c’est sans doute le joueur qui s’approche, aujourd’hui, le plus de la définition de la star de baseball.

Mais finalement, j’ai envie de donner le titre de star à l’effectif au complet. Si la fin du spring training se passe sans heurt, le line-up de l’Opening Day pourrait ressembler à une machine de guerre : LeMahieu, Hicks, Voit, Judge, Stanton, Torres, Andujar, Frazier, Sanchez le tout accompagné par Cole. Avec un banc de joueurs complémentaires et une rotation de qualité, la star de cette années 2021 pourrait définitivement être l’équipe au complet.

Le prono :

La question des blessures aura finalement été le fil conducteur de cette preview. Beaucoup d’incertitudes quant à la tenue des corps d’une grande partie des joueurs. Aussi, la projection est hasardeuse. Mais dans une division où les tenants du titre se sont affaiblis, où les Blue Jays sont encore jeunes et faibles sur le monticule, on peut décemment parier que les Yankees seront en course pour remporter la division. Si le château de cartes ne s’effondre pas, on peut même penser que les 100 victoires seront dépassées tant l’équipe est puissante et les joueurs complémentaires. Mais restons raisonnables et misons plutôt sur 97 victoires pour 65 défaites, puisque quelques blessures par-ci par-là viendront affaiblir quelque peu l’équipe.

Prono The Strike Out : 97 victoires – 65 défaites

Prono PETOCA :  97 victoires – 65 défaites


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