
Il est le plus grand closer de l’histoire du baseball. Il fut un membre du légendaire Core Four de la Nouvelle Dynastie des Yankees de New York et détient pour longtemps encore le record de sauvetages dans les Majeures. Mais au-delà de son talent, de ses records et de son dithyrambique palmarès, le dernier numéro 42 de l’histoire de la MLB fut aussi un joueur unanimement apprécié pour sa personnalité sur et en dehors des terrains. Le voici désormais pour l’éternité avec les autres légendes du baseball au sein du Hall of Fame, le premier avec 100 % des voix, lui qui était encore pêcheur de profession à 19 ans, préférant le football au baseball. Retour sur l’incroyable destin de Mo.
Quand on évoque Mariano Rivera, on pense à deux choses : les chiffres qui résument sa carrière et la page d’Histoire qu’il a écrite avec les Yankees à la fin des années 90 et au début des années 2000. Pour les chiffres, ils sont exceptionnels. En voici quelques uns :
– 652 : le nombre de sauvetages en carrière. Le record précédant était détenu par Trevor Hoffman avec 601 saves et, qui est d’ailleurs, entré au Hall of Fame en 2018. Les deux hommes ont joué en même temps du milieu des années 90 aux années 2010 mais c’est Mariano Rivera qui a finalement pris le meilleur.
– 5 : le nombre de World Series remportés entre 1996 et 2009 avec un titre de MVP des Séries Mondiales en 1999. L’un des nombreux titres individuels de sa carrière. Il a également remporté avec les Yanks sept fanions de ligue.
.@MarianoRivera faced 299 LHB in the #postseason.
He gave up ZERO home runs. (h/t: @Joelsherman1) pic.twitter.com/0RdqZQDIti
— MLB Stats (@MLBStats) January 22, 2019
–13 : son nombre de participation au All-Star Game de 1997 à 2013. Il en fut le MVP à sa dernière participation.
–19 : son nombre de saisons jouées en MLB et ce, sous un seul maillot, celui des Bronx Bombers, de 1995 à 2013, année où il était le joueur en activité le plus âgé.
– 0.70 : son ERA en 16 campagnes de postseason. Un record en MLB. Son ERA de carrière est tout aussi exceptionnel avec 2.21 en 1115 matchs, un record de matchs lancés en American League.
Un Palmarès à la hauteur de son talent
Ces quelques chiffres montrent le joueur que fut Mariano Rivera. Mais un tel talent avait besoin d’une scène grandiose. Les Yankees de New York furent la scène idéale tout comme ils ont profité de son talent au meilleur moment possible, celui de l’émergence du Core Four.
En 1995, quand Rivera débarque dans les Majeures, les Pinstripes n’ont plus gagné l’American League depuis 1981. Pire, leur dernier titre en World Series remontent à 1976. Une éternité pour la franchise du Bronx. Mais en 1995, quatre jeunes joueurs débutent dans le Show avec les Yankees. Outre Rivera, on retrouve Derek Jeter, Jorge Posada et Andy Pettitte. Les quatre joueurs vont éblouir de leurs talents la MLB et dès 1996, ce qui va devenir le Core Four, portent les Yankees vers la victoire en World Series.
Ils récidivent de 1998 à 2000, devenant la Nouvelle Dynastie victorieuse de la franchise après celles qui engrangèrent les titres des années 20 aux seventies. En 1998, les Bronx Bombers établissent une saison record avec une fiche de 114 victoires pour 48 défaites et un total de 125 victoires jusqu’au match 4 des World Series où ils sweepent les San Diego Padres. Pour beaucoup, il s’agit de la meilleure équipe de baseball de l’histoire de la MLB avec les Yankees de 1927 (Boston 2018 who?).
En 2009, le Core Four gagne un dernier titre en Séries Mondiales pour les Yankees puis chacun leur tour, ils font leurs adieux au Show. Rivera connaît sa dernière saison en 2013. Il reçoit cadeaux et ovations dans tous les stades de la MLB qu’il croise cette saison-là, une tournée d’adieu exceptionnelle que peu de joueurs ont eu la chance d’avoir. Son comparse Derek Jeter et son rival David Ortiz auront droit également à des tournées d’adieu du même ordre, comme si le monde du baseball, en disant adieu à ces légendes, disait adieu à une certaine époque et idée du baseball.
Ce qui n’est pas surprenant car Mo, comme on le surnomme, partage avec Jeter et Ortiz l’image de joueurs talentueux, victorieux et surtout respectueux. Des franchise players qui étaient des modèles en termes de travail, d’humilité et de longévité. Des symboles de greatness, de grandeur, à l’instar des Lou Gehrig et Ted Williams. Leurs retraites ont fait prendre conscience à l’Amérique qu’ils étaient les derniers échos d’un passé glorieux, quand le baseball était le sport roi, directement connectés au cœur des gens et à l’histoire des États-Unis. Une époque aujourd’hui fantasmée alors que le sport se noie dans les milliards et les réseaux sociaux.
D’un gant en brique de lait à Hall of Famer
Mariano Rivera représente donc beaucoup pour le baseball. Pourtant, alors qu’il n’est qu’un enfant parmi les autres au sein d’un petit village de pêcheurs du Panama, le petit Mariano préfère le football au baseball. Il y joue avec les copains sur la plage et se rêve en Pelé, son joueur préféré. Pour le baseball, ses camarades et lui font preuve d’inventivité, n’ayant pas l’argent pour se payer du vrai matériel. Les gants sont confectionnés avec le carton des briques de lait, les battes avec des branches et des manches à balai, les balles sont des filets de pêche emmaillotés dans du ruban adhésif.
Le jeune Mariano doit attendre ses 12 ans pour avoir son premier vrai gant de baseball, offert par son père, capitaine d’un bateau de pêche. À 16 ans, il a quitté le système scolaire et le voilà travaillant sur le bateau de pêche de son père. Un travail extrêmement dur. Il aspire alors à devenir mécanicien, surtout qu’il doit arrêter le football à cause de blessures aux genoux et à la hanche. Au niveau sportif, il décide de se consacrer au baseball, plus par loisir que par ambition professionnelle. Pour cela, il intègre à 18 ans une équipe locale amateur et en devient le short-stop.
Il est supervisé une première fois par le recruteur de la MLB, Herb Raybourn qui ne voit pas en lui un short-stop au potentiel professionnel. Ce n’est que partie remise. Entre-temps, alors que son oncle meurt suite à un accident sur un bateau de pêche, il décide de quitter ce domaine. Au baseball aussi, il souhaite changer. Devant les mauvais résultats des lanceurs de son équipe, il demande à être repositionné sur la butte. Bien que sans expérience à ce poste, il performe suffisamment pour que deux de ses coéquipiers le recommandent à un recruteur local.

Deux semaines après ses débuts sur un monticule, il est invité à un tryout des Yankees à Panama City où il retrouve Herb Raybourn devenu le chef recruteur en Amérique Latine pour la franchise du Bronx. Cette fois-ci, Raybourn voit le talent du jeune homme derrière son inexpérience. En 1990, à l’âge de 20 ans, Mariano Rivera signe comme agent libre pour 3000 dollars avec les New York Yankees.
Alors qu’il ne parle pas anglais et qu’il n’a jamais quitté le Panama, il s’envole vers le monde redoutable des Ligues Mineures. Signe du destin, son premier coach en Minor League n’est autre que le premier releveur Hall of Famer et premier recordman des sauvetages en MLB, Hoyt Wilhelm. Après d’excellents débuts en Rookie League, il se blesse en 1992, échappant de peu à une opération Tommy John.
À ce moment, le destin semble jouer pour le duo Yankees-Rivera. Les premiers n’ont pas protégé Rivera contre la draft d’expansion de 1992. Cette année-là, la MLB accueille deux nouvelles franchises, les Florida Marlins et les Colorado Rookies. Heureusement pour les Pinstripes, aucune des deux équipes ne sélectionne Rivera. Pour les Florida Marlins, ils se consoleront avec le deuxième meilleur closer de l’histoire, signé dans cette draft, Trevor Hoffman. Quant à Rivera, il revient sur les terrains en 1993 et fait ses débuts dans les Majeures deux ans plus tard.
Testé brièvement en partant, Rivera devient rapidement releveur en 1995. Il échappe à deux tentatives de trade au milieu de la saison puis au printemps 1996, au moment où George Steinbrenner ne veut pas confier l’arrêt-court au jeune Jeter. Les Yankees étudient son transfert à Seattle qui en retour donnerait leur short-stop Felix Fermin. Le trade ne se fait pas et on connaît la suite. Rivera et Jeter amènent les Yankees au sommet,, le panaméen devenant le closer régulier des Bronx Bombers dès 1996, grâce à son lancer devenu culte, une cutter dévastatrice.
Tout fan Yankees regrette aujourd’hui l’époque où le plus grand closer de tous les temps entrait au son de Enter Sandman de Metallica pour endormir définitivement les espoirs adverses de revenir dans le match. Désormais, voilà Mo qui entre au Hall of Fame où sa légende va reposer éternellement. La mémoire de ses exploits restera elle bien vivace dans nos esprits.
Une réflexion sur “Mariano « Sandman » Rivera, de pêcheur à membre du Hall of Fame”