WBC 2023 – Israël : les cinq questions que vous vous posez peut-être sur le baseball israëlien

Du 8 au 21 mars prochains, se tiendra une compétition très attendue par les fans de baseball du monde entier, la World Baseball Classic. Regroupant les vingt nations les plus fortes du moment, la WBC 2023 promet un crû exceptionnel à la lecture des premiers rosters publiés. Jusqu’à l’ouverture du tournoi, The Strike Out vous propose de découvrir chaque jour l’un des pays participants sous l’angle de l’actualité ou de l’histoire. Interviews, récits historiques, biographies ou présentation de championnats, vibrez baseball international avec TSO. Pour le dernier article thématique sur les pays en compétition, direction le Proche-Orient sur les rives de la Méditerranée avec l’une des équipes surprises de ces dernières années, Israël.

Le baseball n’a jamais été associé à Israël avant 2017. Puis, durant la Word Baseball Classic 2017, Israël a surpris son monde en se hissant à la 6ème place de la compétition. Depuis, l’équipe du Proche-Orient, qui évolue dans les compétitions européennes, s’est imposée sur la scène internationale, représentant même l’Europe lors des Jeux Olympiques de Tokyo qui se sont tenus en 2021. Pour comprendre comment Israël est devenu un concurrent majeur des grandes compétitions internationales et en apprendre plus sur son baseball, The Strike Out répond à cinq questions que vous vous posez peut-être sur le sujet.

1- Quand le baseball a-t-il débuté en Israël ?

Pour retrouver les premières traces connues du baseball en Israël, il faut remonter à1927 alors que la région est encore sous mandat britannique. C’est plus précisément le 4 juillet 1927 que le baseball y fait ses premiers pas quand un match est organisé entre 18 joueurs américains, dont l’initiateur du match, le Dr. Judah Leib Magnes. Ce rabbin américain, né en Californie et ardent pacifiste, rejoint la Palestine mandataire, territoire perdu par l’Empire Ottoman après la Première Guerre Mondiale et que la Société des Nations, ancêtre de l’ONU, donne en mandat aux Britanniques de manière provisoire en 1920 puis définitive en 1923 ; tout comme l’Irak et le territoire attenant à la Palestine, la Transjordanie. La France aura, elle, comme territoires sous mandat le Liban et la Syrie.

Magnes devient en 1925 le premier chancelier de l’université hébraïque de Jérusalem, inaugurée en présence d’Albert Einstein, grand soutien du projet. Pour la fête nationale américaine de 1927, Magnes veut faire découvrir le National Pastime et un match est donc organisé durant les festivités. Il a lieu sur le terrain de football du Maccabi Hashmonai de Jérusalem et il remporte un beau succès. Malheureusement, même si d’autres rencontres auront lieu de temps à autre, le baseball ne prend pas dans la région, notamment dans la communauté juive, tant pour des raisons pratiques que culturelles. Une anecdote, qui n’a jamais été confirmée, semble néanmoins illustrer cette barrière culturelle. Le même jour que le match de Magnes, l’Orphelinat Sepharade de Jérusalem offrit aux enfants un équipement de baseball qui servit d’équipement… de football… les enfants, n’ayant aucune idée de ce jeu, préférant frapper les balles de baseball avec leurs pieds.

Il faut attendre les années 1980 pour voir le baseball s’implanter en Israël avec un premier terrain construit en 1979 au sein du Kibboutz Gezer, fondé en 1974 dans le centre du pays, par des personnes issus de communautés juives nord-américaines. Le développement de la pratique est permise par des expatriés nord-américains ayant fait leur aliyah, nom donné à l’immigration des personnes juives en Israël.

En 1986, l’Israel Association of Baseball (IAB) est fondée par Randy Kahn, juif américain qui a émigré en Israël depuis le Texas, avec notamment le souhait d’enseigner le baseball aux enfants. D’ailleurs, dès 1987, un premier championnat Little League est organisé dans le pays. L’IAB rejoint la fédération européenne de baseball en 1995.

Quant au softball, l’Israel Softball Association est fondée à la même époque, en 1979, également par des immigrants venus d’Amérique, du Nord mais aussi du Sud.

2- La première division locale est-elle professionnelle ?

Israël ne possède pas de championnat professionnel. La première division se nomme Israeli Premier League et regroupe actuellement cinq équipes : Tel Aviv, Team Misgav, Ra’anana, Bet Shemesh et l’Israel Baseball Academy, l’équivalent de nos pôles Espoir France. La saison se déroule d’octobre à juin et les champions en titre sont les Ra’anana Raiders, qui ont sweepé en finale Team Misgav, fin juin 2022. Ce sont d’ailleurs les Raiders qui firent le doublé en 2021/2022 en remportant également le championnat Junior face à Tel Aviv.

Néanmoins, le pays connut durant une saison les joies du baseball professionnel en 2007 quand le businessman bostonien Larry Baras lance l’idée de l’Israel Baseball League. Le projet est ambitieux et la ligue va accueillir quelques grands noms en son sein. Ainsi, le directeur des opérations baseball n’est autre que Dan Duquette. Deux fois meilleur dirigeant de la MLB, il fut le general manager des Expos de Montréal puis des Red Sox de Boston durant les années 1990 avant de devenir celui des Orioles de Baltimore en 2014. Une recrue de luxe. Parmi les managers d’équipe, on retrouvera Ron Blomberg, premier DH de l’histoire en 1973 avec les New York Yankees, Art Shamsky, un des piliers des Miracle Mets de 1969 ou encore Ken Holtzman qui lança deux no-hitters lors d’une riche carrière en MLB. Le commissaire de la ligue n’est autre que l’ancien ambassadeur américain en Israël et en Egypte, Dan C. Kutzer, et le comité directeur compte plusieurs dirigeants du sport américain dont le commissaire de la MLB, Bud Selig, et sa fille, Wendy Selieg-Pieb, alors propriétaire des Milwaukee Brewers.

Les équipes sont au nombre de six (Tel Aviv Lightning, Netanya Tigers, Bet Shemesh Blue Sox, Petach Tikva Pioneers, Modi’in Miracle, and Ra’anana Express) et regroupent 120 joueurs à l’issue de tryouts internationaux et d’une draft. La majorité des joueurs viennent des Etats-Unis mais on y trouve également des joueurs israéliens, dominicains, canadiens, australiens, colombiens, japonais et même néo-zélandais et ukrainiens. Le dernier joueur choisi durant la draft n’est autre que Sandy Koufax, en l’honneur de sa legacy au sein de la riche et longue histoire du baseball juif. Pas de major leaguer dans le lot mais des joueurs venant de ligues mineures, de ligues indépendantes, de championnats professionnels à travers le monde et du baseball universitaire américain.

Malgré le soutien de la MLB, de la chaîne PBS et de nombreuses personnalités du baseball américain, la ligue ne survit pas au départ de plusieurs dirigeants, sur fond de désaccords sur sa gestion. La ligue n’est pas renouvelée en 2008, offrant aux Bet Shemesh Blue Sox de Ron Blomberg et Eric Holtz (le futur manager de l’équipe nationale de la fin des années 2010 a remplacé l’ancien joueur des Yankees en cours de saison) le seul titre professionnel de baseball gagné en terre d’Israël. L’aventure fut immortalisée par Aaron Pribble, un des lanceurs de la ligue, issu des indy leagues US, dans un livre publié en 2011 : Pitching in the Promised Land: A Story of the First and Only Season in the Israel Baseball League.

3- Est-ce qu’il y a beaucoup de pratiquants en Israël ?

L’IAB avance régulièrement le chiffre de 1000 pratiquants de baseball dans le pays. Pendant très longtemps, c’est le baseball jeune qui était le plus développé alors que la pratique adulte était presque embryonnaire en comparaison. En 2006, la fédération israélienne ne comptait que 49 joueurs adultes pour trois équipes seniors plus les jeunes adultes de l’équipe nationale junior.

Dans un pays où le sport national est, de loin, le football et où le basketball représente l’autre grand sport collectif, le baseball a longtemps végété. Mais il connaît depuis quelques années une dynamique grâce aux résultats de l’équipe nationale et l’aide d’institutions juives américaines et de la MLB pour développer infrastructures, coaching et techniques des joueurs.

4- Est-ce qu’il y a des joueurs israéliens en MLB ?

Dean Kremer – crédit : G Fiume/Getty Images

Actuellement, un seul joueur israélien évolue en MLB en la personne de Dean Kremer, releveur chez les Baltimore Orioles depuis 2020.

Né en Californie de parents israéliens, il possède la double nationalité, grandissant essentiellement aux Etats-Unis mais vivant deux mois par an en Israël. Néanmoins, Kremer a été formé au baseball aux Etats-Unis, jouant notamment pour les Rebels de l’Université de Las Vegas, avant d’être drafté par les Los Angeles Dodgers en 2016 puis tradé aux Orioles en 2018. Après deux premières saisons difficiles, il a offert aux Orioles une solide année 2022. En parallèle, après avoir gagné l’or aux Maccabiah Games 2013 (une sorte de Jeux Olympiques de la communauté juive) avec Team USA, il a commencé à joué pour Team Israël en 2014, participant à la WBC 2017.

Pour le moment, aucun joueur formé en Israël n’est parvenu à jouer en MLB. Parmi les grands noms issus du baseball israélien, on peut citer Dan Rothem, Shlomo Lipetz et Alon Leichman, les trois seuls israéliens de l’équipe WBC d’Israël lors de leur premier qualifier en 2013.

Dan Rothem, lanceur natif de Tel Aviv, joua dans l’équipe de sa ville lors de l’unique saison de l’IBL en 2007 et remportant le titre de MVP. Il fut également le premier joueur né en Israël à évoluer dans le baseball universitaire américain. Il a été introduit dans la première promotion du Baseball Hall of Fame d’Israël en début d’année.

Shlomo Lipetz, tout comme Rothem, est un lanceur natif de Tel Aviv. Tout comme Rothem, il joua en IBL pour les Netanya Tigers, et il fut le second joueur né en Israël à jouer en universitaire aux Etats-Unis, avec le San Diego Mesa College puis les Tritons de l’Université de Californie à San Diego. Il fut des grandes aventures de l’équipe nationale : WBC 2017, Euro 2021 (2èmes) et JO Tokyo 2020 (en 2021). A l’âge de 44 ans, il est toujours dans le roster pour la WBC 2023.

Enfin, Alon Leichman est le seul joueur né en Israël à avoir fait son chemin en MLB… mais comme coach. Leichman est né au Kibboutz Gezer en 1989, dix ans après la construction du premier terrain de baseball du pays dans ce même kibboutz. A l’instar de Lipetz, il a lancé pour les Tritons à San Diego ainsi que pour le Cypress College. Il a rejoint l’équipe nationale en 2008 et a participé aux Jeux de Tokyo. Côté baseball professionnel, il devient pitching coach pour les Dodgers au sein de leur ligue d’instruction en 2016, après l’avoir été la même année en Cape Cod Baseball League. En 2018, il débarque dans les ligues mineures des Seattle Mariners, grimpant les niveaux saisons après saisons jusqu’à devenir le pitching coach de leur équipe AAA en 2022. En décembre dernier, il parvient enfin en MLB, obtenant le poste d’assistant pitching coach pour les Reds de Cincinnati.

5- Quels sont les résultats de l’équipe nationale ?

Durant les deux premières décennies d’existence de l’IAB, Israël se fait surtout connaître par ses équipes jeunes, d’abord en Little League puis, durant les années 2000, dans les compétitions de la fédération européenne, avec notamment une 3ème place à l’Euro U12 2006. Il faut attendre les années 2010 pour voir l’équipe senior faire parler d’elle.

Cela commence en 2012 quand, à l’instar de la France, Israël fait partie des nations invitées aux premiers qualifiers de la World Baseball Classic dans le cadre de l’élargissement de la compétition. Profitant des règles spéciales de la WBC ainsi que des règles concernant la nationalité israélienne, l’équipe va bénéficier de précieux renforts à partir de ce qualifier. Même si les joueurs MLB ne sont pas disponibles, Israël est renforcé de joueurs des ligues mineures comme le futur major leaguer, Joc Pederson. Après avoir gagné son premier match contre l’Afrique du Sud 7-3, elle perd 4-2 face à l’Espagne qu’elle retrouve dans le match décisif de qualification. Une nouvelle fois, l’Espagne s’impose mais en 10 manches et sur le score serré de 9-7.

Israël après sa victoire face à Cuba lors de la WBC 2017 – crédit : Kyodo

Israël ne manque pas le coche en 2016 lors du qualifier pour la WBC 2017. Face à la Grande-Bretagne et le Brésil, elle gagne ses deux premiers matchs sur des scores serrés avant de s’imposer en finale largement contre les Britanniques. Cela lui permet de participer à la WBC 2017 et d’étonner le monde en prenant la 6ème place du tournoi, se permettant, au premier tour, de sortir de son groupe à la première place, devant les Pays-Bas, futurs demi-finalistes et éliminant au passage deux nations phares du baseball : la Corée du sud et Taïwan avec trois victoires contre ces trois équipes (respectivement 4-2, 2-1 et 15-7). Menée par des joueurs MLB comme Jason Marquis, Ike Davis, Sam Fuld et Ty Kelly, l’équipe israélienne continue de frapper un grand coup en débutant le round suivant par une victoire 4-1 contre Cuba. Mais, dans le match suivant, les Pays-Bas prennent leur revanche 12 à 2 avant que le Japon n’élimine Israël sur le score de 8-3. Néanmoins, cette 6ème place a permis aux israéliens d’être directement qualifié pour 2023.

La WBC 2017 lance Israël dans une autre dimension, grâce notamment à de nombreux joueurs américains faisant leur aliyah et renforçant ainsi l’équipe nationale pour les compétitions non soumises aux règles WBC. Jamais qualifiée pour l’Euro Baseball avant cela, elle y parvient en 2019, terminant demi-finaliste après avoir écarté la France en quart. En 2021, elle obtient l’argent après avoir battu la France 10-0 en poule, la République Tchèque 3-2 en quart et le mastodonte italien en demi 11-5. Ce sont les Pays-Bas qui mettront un terme à leur sans-faute lors d’une finale gagné 9-4 par les Néerlandais.

Le top 5 européen de 2019 donne à Israël la possibilité de participer aux qualifications pour le tournoi olympique des Jeux de Tokyo, tournoi que remporte Israël devant les Pays-Bas, à la différence de runs. Seul représentant européen aux JO, Israël, qui compte sur le renfort de l’ancien joueur MLB et actuel manager Ian Kinsler, va terminer 5ème du tournoi olympique sur 6 nations présentes. Les israéliens y remportent une seule victoire, face au Mexique (12-5), passant proches de battre la Corée lors de leur premier match (5-6 en 10 manches) et la République Dominicaine dans le dernier (6-7 avec les deux points de la victoire en 9ème pour les dominicains), tout en étant surclassés par les Américains (8-1) puis la Corée du Sud (11-1) dans leur deuxième confrontation.

Actuellement, Israël est au 20ème rang mondial.

En softball, l’équipe féminine est présente à l’Euro depuis 2003. Longtemps en fin de classement, elle est parvenue à la 9ème place en 2019 et à la 4ème en 2021, participant aussi à la dynamique des sports de batte israéliens. L’équipe féminine de softball est à la 12ème place mondiale selon le dernier ranking WBSC de décembre 2022.


Laisser un commentaire