Qu’il est frustrant de grandir dans l’ombre d’une équipe qui, avec une ou deux bagues de plus, pourrait être considérée comme l’une des plus grands Super Teams de tous les temps. Vous voyez, impossible de parler des Padres sans ouvrir sur leurs glorieux voisins californiens. Pourtant, dans l’ombre des Dodgers, le projet ultra-ambitieux des Padres prend corps, lentement à grands coups de bling et de dollars, et malgré les petites galères et déconvenues qui semblent coller à la peau de la franchise de San Diego. Alors 2022 : point de départ d’une succès story attendue ?
Des investissement colossaux, un roster bourré de talent – à défaut de profondeur – sur la butte comme au bâton, un top manager (Bob Melvin) recruté l’hiver dernier pour mener cette petite troupe vers le succès, on espérait encore voir en ces Padres une équipe capable d’aller titiller les surpuissants Dodgers. Outre le bilan face au « rival » régional (14-5 Dodgers), les Padres ont surtout brillé par leur irrégularité et leur capacite à souffler le très très chaud et le glacial. Habitués des « blowouts » pour le meilleur et pour le pire (26 victoires et 22 défaites par plus de 5 runs d’écart), les Padres n’ont brillé ni par leur production offensive (705 runs marqués, 13e de MLB), ni par leur solidité défensive (660 runs concédés, 10e) .
On ne fera pas le détail de chaque stat mais prenez toutes les stats de base (ERA des lanceurs et des starters, Home Runs, bases volées, moyenne au bâton et moyenne adverse) et vous aurez du mal, beaucoup de mal à trouver les Padres faire mieux qu’une huitième place. Les Padres sont de ces équipes capables de faire tomber un géant au terme d’une prestation héroïque avant de s’effondrer contre une équipe de Little League… bon d’accord je forcis un peu le trait.
Menés par un Manny Machado MVPesque (.298, 37 2B, 32 HR, 102 RBI) et qui a plus que fait oublier l’absence de Tatis Jr., les Padres se sont renforcés progressivement au cours de la saison par des trades ambitieux, n’hésitant pas à vider leur farm system pour acquérir les superstars Juan Soto et Josh Hader (voir plus bas) avec dans l’objectif un retour indispensable en postseason. Pari gagné même si l’on attend encore de voire toute la force offensive d’un impressionnant début de lineup Profar-Soto-Machado-Cronenworth-Bell. Si seulement le reste du lineup et le banc pouvaient suivre…
Côté lanceurs, même topo : avec Darvish, Snell, Musgrove, Manaea et Clevinger, Bob Melvin dispose sur le papier d’une rotation que 80% des managers de MLB rêveraient d’avoir à leur disposition. Et pourtant, le constat est le même, toujours, les outils sont la mais le produit fini n’est pas au niveau des attentes des fans des Padres.
Things that start with M:
🔘 Manny
🔘 MVP
🔘 Machado pic.twitter.com/cLOiZDxOYK— San Diego Padres (@Padres) October 2, 2022
Les déceptions
On ne parlera pas de Fernando Tatis Jr., blessé dans un accident de motocross avant la saison puis pris par la patrouille antidopage pour l’utilisation d’un stéroïde interdit. Soin pour la peau ou dopage, même tarif : c’est 80 matchs et une saison terminée avant d’avoir débutée pour la jeune star des Padres.
Car, parmi ceux qui ont joué, on reste sur notre faim avec les deux gros morceaux pêchés à la Trade Deadline qui n’ont pas apporté ce qui était attendu/prévu.
D’abord Juan Soto. Le Ted Williams du 21e siècle arrivait avec une hype de malade, mais n’est jamais vraiment rentré dans son nouvel uniforme. Son début de saison avec Washington était déjà bien en-dessous de ses standards : une moyenne de .246 avec 84 hits en 101 matchs. Les tracasseries contractuelles visiblement dans sa tête contrairement à un autre slugger (We see you Aaron Judge). Avec San Diego, ce fut donc moyen voire très moyen : moins de 40% de présence sur bases, une première pour lui en carrière ; AVG .236, 16 RBI et 6 petits homeruns en 52 matchs pour celui qui venait de remporter le HR Derby du All-Star Game juste avant son transfert. On attend de voir ce qu’il va faire pendant cette Wild Card Series car le Dominicain aime les affrontements haute-tension face aux plus gros lanceurs MLB. Ce n’est pas ce qui manquera face aux Mets avec deGrom et son ancien coéquipier Scherzer. On se souvient encore des exploits de Soto en 2019 face à Kershaw, Verlander, Cole ou encore Josh Hader…
… Hader qui décroche notre 2e carton jaune. Pour lui aussi, 2022 n’avait pas commencé en fanfare : certes 29 saves, mais une ERA de 4.24 avec 4 défaites, 7 HR concédés en 37 matchs avec les Brewers (contre 3HR sur toute la saison 2021). Ce fut pire avec les Padres. 12 points concédés sur ses 7 premières sorties qui l’ont vu temporairement se voir retirer le rôle de closer. Au global, en 19 matchs, une moyenne adverse catastrophique de .270, une WHIP de 1.63 (soit le double de ses standards les années précédentes), une ERA de 7.31 en 16IP. Comme pour Soto, l’apport de Hader sera scruté dans cette première série face aux Mets.
La satisfaction
On a beaucoup aimé ici la saison 2022 de Joe Musgrove. Dans la foulée de son no-hitter en 2021 (premier de l’histoire de la franchise) et de sa prolongation de contrat (100M$ sur 5 ans), le lanceur californien a parfaitement tenu son rang. Le droitier a partagé le rôle d’Ace avec Yu Darvish dans la rotation, c’est bien ça fait moins de pression pour chacun. 10 victoires, une ERA inférieure à 3.00 en 30 starts : des standards que seuls 12 lanceurs des Padres avaient atteints avant lui. 184K c’est un peu moins que sur la saison 2021 mais l’ami Joe a en parallèle concédé moins de BB et de HR.
Musgrove est passé par trois franchises (Blue Jays, Astros, Pirates) avant d’arriver dans celle où il a toujours voulu jouer, lui qui a grandi en applaudissant aux exploits de Jake Peavy (NL Cy Young 2007) dont il porte fièrement le numéro 44. Face au monstrueux duo des Mets, deGrom-Scherzer, les Padres auront besoin d’un Musgrove et d’un Darvish au top pour espérer passer les Wild-Cards. Lui qui a déjà une bague de champion au doigt (pas vraiment assumée à cause du scandale de triche des Astros en 2017), ne rêve que d’une chose : aider SA franchise à décrocher ses premières World Series. Go Joe !

Les Mets avant L.A.?
Quoi qu’il en soit, les Padres ont réussi à composter leur ticket et c’est une nouvelle aventure qui commence. Et face à des Mets qu’ils ont battu 4 fois sur 6 cette saison et qui leurs ressemblent un peu dans la capacité à s’auto-infliger un psychodrame permanent, l’occasion est belle de s’offrir un nouveau rendez-vous face au tyrannique voisin de la Cité des Anges.
Redoutablement armés quand ils sont dans un bon jour, les Padres se doivent de s’annoncer sur la grande scène des playoffs par une performance majuscule pour s’établir comme des contenders pour les années à venir. Et ils garderont dans un coin de leur tête que dans l’enfer de la postseason, tout est possible, absolument tout, et même s’extirper de l’ombre de l’encombrant voisin pour s’offrir un quart d’heure de gloire auquel on ne croyait plus.