Preview 2022 – Los Angeles Dodgers : L’empire contre-attaque

Les Dodgers ont montré combien il est difficile de gagner un titre majeur US deux années consécutives. De la difficulté à (re)construire une cohésion d’équipe à la gestion de l’extra-sportif, la vie de champion ne fut pas de tout repos en Californie. Mais les poches sans fond du propriétaire et la soif de revanche de certains grognards pourraient bien faire revenir le Commissionner Trophy du côté de Chavez Ravine.

Dès le 16 avril, la tension est palpable chez les Dodgers (et les Padres). ©Getty Images

Retour sur la saison 2021 :

Le plan était parfait. Après quelques saisons de construction patiente, le titre qui se dérobait sous les pieds des Dodgers (finalistes en 2017 et 2018) était enfin acquis au terme d’une saison étrange. Qu’importe, le vaisseau amiral californien piloté par Andrew Friedman (PBO), Brandon Gomes (GM) et Dave Roberts (manager) était maintenant prêt à dominer la ligue et créer une nouvelle dynastie.

Oui, mais… Malgré une saison excellente pour n’importe quelle franchise, dans la bouche des Dodgers elle a un goût d’inachevé.

Du départ de la saison, égalant le record de victoires par un champion en titre (13v-2d), à la qualification en playoffs 1 mois avant la fin de la saison régulière, il y a toujours eu ce grain de sable, cette poussière dans l’œil pour gêner les Dodgers et les empêcher d’être complètement à l’aise au sommet de la ligue.

L’hiver 2020-2021 commençait sous les meilleurs auspices. Justin Turner venait d’être prolongé et les Dodgers venaient de gagner la bataille des ultra-riches pour s’attirer les faveurs du meilleur pitcher de 2020, Trevor Bauer. Ces signatures, s’accompagnaient de la perte de Kiké Hernandez (Red Sox) et Joc Pederson (Braves). Pertes qui allaient être compensées par l’arrivée à maturité de 2 baby Dodgers, Zach McKinstry et Edwin Rios, pour peupler le banc. Malheureusement, le vent n’a pas tourné en faveur des Angelinos.

Si la prolongation de Turner s’est avéré judicieuse, le solide 3B postant l’une de ses meilleures saisons en carrière (27 HR, 87 RBI, .278/.361/.471), l’arrivée de Trevor Bauer s’est avérée être un cadeau empoisonné. Ses démêlés avec les arbitres, la ligue, les fans, et surtout la justice, l’ont éloigné du baseball, et ce pour un moment. Et bien qu’il ne soit pas poursuivi pénalement, la Ligue risque de le suspendre à son retour au vu de sa politique contre les violences domestiques.

Trevor Bauer dit au-revoir à sa carrière ©Rick Scuteri-USA TODAY Sports

Les pertes d’Hernandez et Pederson au niveau de la profondeur de banc se sont avérés être très ennuyeuses sur la longueur, et carrément problématique lors des playoffs. Et il a été impossible pour McKinstry et Rios de pouvoir s’installer, la faute à des blessures récurrentes.

L’infirmerie, parlons-en. Les absences redondantes des forces vives de l’effectif (Bellinger, Seager, Lux, Muncy, Kershaw,…) ont clairement plombé la cohésion qui aurait pu permettre aux Angelinos d’aller chercher les Giants en haut de la NL West.

Un pitching 5 étoiles, des titulaires et des releveurs, n’a pu relever l’impossibilité d’emmener au but les joueurs sur base lors des situations critiques (27e de la ligue avec en moyenne 15 coureurs laissés en position de scorer en fin de match), et ainsi faire la différence pour écraser la concurrence.

Au-delà de ces ralentissements, les Dodgers ont continuellement dominé leurs adversaires plus faibles de National League en saison régulière (coucou les Padres), tout en se permettant le luxe de se séparer de leur top prospect Keibert Ruiz (ainsi que de 3 autres) pour obtenir en échange Trea “Speedy” Turner et Max “Legend” Scherzer.

Trea Turner vole, mais en douceur. Gentleman-Cambrioleur.

Deux additions qui s’avèreront cruciales dans la course aux playoffs, car malgré 106 victoires au compteur, LA passera par un Wild Card Game de tous les dangers face aux Cardinals, conclu par un walk-off HR de l’inusable Chris Taylor.

Un manque de profondeur de banc et un management étrange des lanceurs provoquera la défaite en NLCS face aux Braves. Un défaite difficile à avaler du côté des bleu et blanc…

La saison 2022 :

“Nous allons gagner les World Series 2022, si notre staff de lanceurs titulaires reste à l’écart de l’infirmerie”. Voilà, le programme de la saison 2022 vous est offert par le manager Dave Roberts.

Pour en arriver à ce niveau de confiance, il convient de regarder de plus près les mouvements opérés par les Dodgers cet hiver.

Niveau départ, Corey Seager est parti monnayer son talent (et son assurance maladie) du côté d’Arlington, Joe Kelly est lui parti muscler le bullpen des White Sox, Corey Knebel celui des Phillies et Kenley Jansen a été recruté par la nouvelle Nemesis : Atlanta.

Bye-bye Pujols (de retour aux Cardinals) et Seager (Rangers) ©Pasadena Star News

Des départs qui pourraient impacter une franchise: Seager, Rookie de l’année 2016 est un candidat au titre de MVP quand sa santé va, Jansen est le meilleur closer de NL depuis 10 ans, recordman du nombre de save pour la franchise (350), et surtout ce sont des produits du farm system de LA.

Mais il n’en est rien. Et le manager Dave Roberts l’a annoncé, les Dodgers vont être champion 2022. Assis sur le meilleur système de développement de joueur des Majeurs, les Dodgers ont plusieurs armes à leur disposition pour compenser n’importe quel départ. Et si en interne la relève n’est pas prête, la flexibilité contractuelle des prospects (et les poches pleines du propriétaire Mark Walter) permet de donner de gros contrats aux agents libres.

Donc, avec un effectif déjà pléthorique, LA s’est permis de remplacer la batte gauche de Seager par celle du MVP 2020 et champion en titre, Freddie Freeman. C’est la signature surprise de la saison morte, tant Freeman est synonyme de Braves dans le monde du baseball. Freeman amène ses stats à une attaque 4e en runs, 4e en HR, 4e en RBI, mais tout juste dans la moyenne de la ligue au batting average (.244 / Freeman .300).

Le GM Andrew Friedman accueille Freddie Freeman, qui vient de voir arriver le premier virement de son nouveau salaire ©USNews

Et pour ne pas revivre les mêmes mésaventures que l’an passée, le banc a été renforcé avec les signatures de Kevin Pillar, leader du Bench Mob chez les Mets et auteur d’une bonne saison 2021 (15HR, 47RBI en sorti de banc) et de Stefen Romero, ancien prospect des Mariners et vétéran de 5 saisons au Japon chez les ORIX Buffaloes et les Tohoku Rakuten Golden Eagles (1561 AB, 96 HR, 264 RBI, 0.264/.331/.497).

Ajoutons le pitching staff, qui a été reconduit dans quasiment son ensemble. Kershaw (10-8, 3.55 ERA, 144SO) poursuit son chemin de légende dans sa franchise de toujours, guidant une équipe ayant fini dans le top 2-3 de la ligue dans quasiment toutes les catégories statistiques en pitching ! Une rotation de titulaires ultra homogène et complémentaire : Walker Buehler (16-4, 2.47 ERA, 212 SO), Julio Urias (20-3, 2.96 ERA, 195 SO) seront les partants assurés d’une place dans la rotation et d’un strapontin (voir plus) à l’élection du Cy Young de NL.

Les prospects Ryan Pepiot, Landon Knack et Bobby Miller seront à la bataille avec Tony Gonsolin et les revenants Andrew Heaney (ex Angels et Yankees) et David Price (Cy Young AL 2012) pour les 2 autres places. Brusdar Graderol et Blake Treinen emmèneront le bullpen, qui vient tout juste de recevoir un ajout de poids en Craig Kimbrel.

Kimbrel arrive des White Sox en échange d’AJ Pollock. C’est une recrue de choix pour remplacer Jansen en tant que closer, lui qui est 8 fois All Star et qui totalise 372 saves en 11 saisons, un flamethrower de très haut niveau, pièce maîtresse du titre de 2018 des Red Sox.

C’est une évidence que toute les pièces sont là pour une autre saison en playoffs, a minima, pour les Angelinos. Et il paraît évident qu’autre chose que le lead de victoires en saison régulière et une apparition en World Series seront les objectifs du front office. A eux de transmettre cette ambition aux joueurs.

Le petit bonus : 2022 verra les Dodgers célébrer les 75 ans de l’intégration de Jackie Robinson en MLB. Robinson ne sera d’ailleurs plus le seul pensionnaire de la Central Field Plaza du Dodgers Stadium, sa statue sera bientôt accompagnée par celle de Sandy Koufax, dont le bronze sera dévoilé le 18 juin. Pile un mois avant la tenue du Home Run Derby et du All Star Game au Stadium.

©MLB.com

La star de l’équipe : le batting order

Jugez par vous-même :

  • C : Will Smith : Sûrement le catcher le plus offensif de MLB (25 HR, 0.860 OPS), pur produit du farm system. C’est aussi le poste du prospect #1 de la franchise, le très prometteur Diego Cartaya.
  • 1B : Freedie Freeman : MVP 2020, 5x All-Star, Gold Glove, Silver Slugger,… déjà bien avancé sur la route de Cooperstown. Une moyenne de 30 HR par saison à 0.300 au bâton, ce qui suffit à définir le bonhomme.
  • 2B : Gavin Lux , l’ancien top prospect, devait continuer son apprentissage dans l’outfield pour son développement en tant qu’utility player. L’échange de Pollock pour Kimbrel pousse le jeune dans la lumière (hihi), pour une saison avec plus d’at-bats, et plus de confiance. C’est aussi en 2B que l’on attend l’éclosion de Michael Busch, qui aura du temps de jeu avec la flexibilité qu’amène le DH universel.
  • 3B : l’éternel Justin Turner, qui, on l’a vu plus haut, ne semble pas donner de signes de vieillissement, gagnant sa deuxième sélection pour le All Star game en 2021 .Pour quand même laisser du mou à Turner, Hanser Alberto a été signé en provenance des Royals, bien avant que le prospect Edwin Rios et son épaule toute neuve ne fasse un Spring training de folie (11AB, 5 hits, 4 RBI, 1 HR, 0.455 à la batte).
  • SS : Trea Turner : C’est la bonne acquisition de l’été dernier, un joueur qui monte énormément sur bases, qui vole, qui tape à 0.300 en moyenne (0.328 en 2021 leader de NL), possiblement avec puissance (28 HR en 2021). Un remplacement plus qu’équitable de Corey Seager.
  • LF : Chris Taylor. L’utility player par excellence, 20 HR et 73 RBI en 2021, va certainement devenir le titulaire du champ gauche après l’échange de Pollock. Mais c’est aussi le gars qui dépanne aux 4 coins du terrain, et qui te sort le walk off hit alors que tout le monde est déjà sur le chemin du parking. Indispensable.
  • CF : Cody Bellinger. On espère retrouver le Bellinger de 2017-2019, qui fut Rookie de l’année en 2017 et qui balaya tout en 2019 : All-Star, Golden Glove, Silver Slugger et MVP à 47 HR, 110 RBI et 0.305 au bâton. Son retour en forme et le tenir éloigné de l’infirmerie sera le facteur X de la saison.
  • RF : Mookie Betts. La référence du champ droit, une machine défensive (5 Golden Gloves en 7 saisons) qui sait aussi produire (4 Silver Slugger, MVP 2018 et top 8 entre 2015-2020). Il a été géné aux entournures en 2021 par une blessure récurrente. Et il est de retour en pleine forme.
  • DH : Max Muncy : Défensivement en-dessous de ses collègues, il devrait être le bénéficiaire du DH universel. Offensivement, le double All Star est un monstre à minimum 30 HR la saison qui gagnerait à moins rechercher la puissance pour monter plus souvent sur bases. Ca tombe bien, Freeman est là pour partager la charge de cleanup hitter.
Merci à Fangraphs de nous montrer combien la profondeur d’effectif est important.

Le joueur à suivre : Julio Urias

Dave Roberts a du s’y prendre en deux fois lors du premier jour du Spring Training. La coupe de cheveux, il la reconnaît. Mais pas la silhouette. La lanceur gaucher n’y est pas allé de son “je suis dans la meilleure forme de ma vie !”. Ca se voit. Il a perdu 20 pounds (9 kg) durant l’hiver, notamment en restant en Arizona plutôt que de rentrer en famille dans son Mexique natal, pour “rester loin des bonbons et du Coca. C’est bon ces trucs là.”

Après s’être battu entre 2016 et 2020 pour une place dans l’effectif, le natif de Culiacan a connu une saison 2021 explosive. Il est devenu le premier joueur de la ligue à remporter 20 victoires depuis 5 ans, menant les Majeurs dans cette catégorie, et étant dans le top 10 de la ligue en ERA (2.96), en manches disputées (185.2), en ERA+ (138).

Ces performances lui auront permis de faire pour la première fois son apparition dans le vote pour le Cy Young (7e). La confiance accordée par Dave Roberts l’année dernière s’est avérée payante, ainsi que le travail sur sa mécanique de lancer, qui ont font un lanceur générant beaucoup de swing’n miss et de flyballs.

Pour 2022, maintenant libéré de la pression de se battre pour une place dans la rotation, avec un hiver studieux sur le plan physique et mécanique (il a ajouté un lancer sweeper cette année à son arsenal, après la fameuse Dodgers slider en 2021), Julio est la 2e tête (Buehler est la première) du duo d’aces à la tête de la rotation des Dodgers, et le digne héritier de Kershaw pour le futur de l’organisation.

Pronostic :

Sur le papier, les Dodgers sont toujours les juggernauts de la NL, et, a fortiori, de la NL West. Ils ont réussi à améliorer leur force de frappe, et leur farm system leur permet de s’asseoir sur une confortable rotation. De plus, il est peu probable que les Giants reproduisent leur exploit de 2021, et les Padres semblent manquer de profondeur d’effectif.

La saison régulière devrait être une formalité pour les Angelinos, qui tenteront d’aller chercher le record de victoires (116) en saison des Cubs de 1906 et des Mariners de 2001. Deux équipes qui ne gagnèrent pas les World Series ces années-là…

Projection TSO : 100 victoires – 62 défaites, 1er de NL West

Projection Fangraphs : 94 victoires – 68 défaites, 1er de NL West


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