Après le marasme et la déprime de l’hiver 2020 accouchant d’une pandémie mondiale et d’une saison MLB raccourcie façon premier lavage à 60°C, TSO revient aux sources et à ses premiers amours : l’écriture. Et si pour le commun des mortels, l’arrivée du printemps signifie l’éclosion des bourgeons et les premiers chants d’oiseaux, pour la grande famille du baseball, printemps rime avec entraînement. Celui du spring training, des premières sorties avec de nouvelles couleurs pour certaines stars et de vieilles retrouvailles avec des rosters déjà bien armés pour d’autres. Que l’on soit fan de la petite balle blanche ou non, le printemps signifie surtout la préparation, le devenir. Et sans révolutionner votre quotidien, The Strike Out vous apporte son brin d’espoir : les fameuses 30 franchises en 30 jours. Aujourd’hui, direction les Red Sox de Boston où le messie, Alex Cora, est revenu d’entre les morts.

Retour sur 2020 :
On n’attendait pas grand-chose des Red Sox en 2020. Moins de deux ans après, les célébrations du triomphe de 2018 avaient déjà un goût d’antiquité : le GM et président des opérations baseball Dave Dombrowski avait été viré en septembre 2019, au terme d’une saison qui avait vu les Red Sox ne pas atteindre les playoffs pour la première fois en quatre ans, le manager Alex Cora avait été suspendu pour une saison en janvier 2020, pour son implication dans le scandale des vols de signe, mais le pire restait à venir pour les fans des Red Sox : LE trade de la saison, LE blockbuster voyait dès Février la star de la franchise, Mookie Betts, quitter le Massachusetts pour rejoindre la Californie et l’invincible armada des Dodgers.
Betts signait quelques mois plus tard une extension pour un nouveau contrat de 12 ans et $365m avec Los Angeles, avant de remporter les World Series 2020 sous les ordres de Dave Roberts. En retour, les Red Sox recevaient un outfielder prêt pour les Big Leagues, Alex Verdugo et deux prospects prometteurs que l’on pourrait voir en 2021 : le catcher Connor Wong et le 2B Jeter Downs. Un trade réalisé côté Red Sox par le nouveau responsable de la franchise Chaim Bloom, dont l’on attend beaucoup à Boston après un passage remarqué du côté des Tampa Bay Rays.
Bref, disais-je, on n’attendait pas grand-chose des Red Sox, mais on ne les attendait pas pour autant à pareille débâcle : 24 victoires et 36 défaites, le quatrième pire bilan de toute la MLB entre Detroit et Baltimore. Avant-derniers en terme de runs concédés, les Red Sox n’ont même pas essayé d’exister dans une division survolée par les Rays et une Surdivision East victime de sa densité en AL comme en NL.
Il faut dire qu’en plus des trades et des remous internes, les Red Sox n’ont pas vraiment été gâtés par les évènements. Le lanceur star Chris Sale a subi une opération Tommy John avant la saison, tandis que David Price avait lui aussi rejoint les Dodgers dans le cadre du trade de Mookie Betts. Eduardo Rodriguez, quant à lui, n’a pas lancé une seule balle due à un COVID sévère et des complications cardiaques, laissant les Red Sox avec le talentueux mais irrégulier Nathan Eovaldi dans le rôle d’ace (48.1 IP, 3.72, 4-2), accompagné notamment par Martin Perez (62 IP, 4.50) , Ryan Weber (43 IP, 4.40), Chris Mazza (30 IP, 4.80) et Zack Godley (28.2 IP, 8.16).

Résultat ? Le troisième pire ERA collectif de MLB (5.38), le pire WHIP (1.60) et la pire moyenne au bâton adverse (.280). Délicat, presque dramatique, avec un bullpen et une rotation rivalisant de médiocrité. Seule satisfaction dans un torrent de déception : les débuts de Tanner Houck qui a remporté trois victoires en trois matchs démarrés, avec 17 manches lancées, un ERA de 0.53 et 21 K. Un bras à surveiller cette saison dans la course pour le titre de Rookie of the Year.
D’un point de vue offensif, le constat de la saison 2020 est bien plus encourageant, sans pour autant que cela ait suffi à effacer les terribles carences en termes de pitching. Troisième franchise de MLB et première d’AL en termes de moyenne au bâton, les Red Sox n’ont pas toujours su convertir leur présence sur base en points, terminant 11e de MLB en terme de points marqués, mais la saison n’a pas été sans satisfactions. Le jeune Alex Verdugo (lire plus bas), notamment, 12e au classement du MVP et qui termine avec une ligne de .368/.367/.478 et une production défensive de qualité (7 DRS entre RF et LF).
A ses côtés, Rafael Devers (.263, 11 HR, 43 RBI), Xander Bogaerts (.300, 11HR, 28 RBI, 8 SB) et Christian Vazquez (.283, 7 HR, 23 RBI), sans forcément être au sommet de leur art, ont fait tourner la baraque et Jackie Bradley Jr. a fait du JBJ, alliant une production défensive d’élite dans le champ centre avec une batte fiable et régulière. Pour le reste, circulez, rien à voir : handicapé par une blessure aux côtes, Andrew Benintendi a participé à 14 matchs pour un AVG de .103 avant de s’installer à l’infirmerie pour le reste de la saison, Michael Chavis (.212, 5 HR, 19 RBI, 50 K) et J.D. Martinez (.213, 7 HR, 27 RBI, 50 K) n’ont sauvé leur manque de contact au bâton que par leur puissance occasionnelle, chose que n’a pas su faire Jose Peraza, titulaire d’une slashline de .225/.275/.342 pour 25 H et 8 RBI en 120 passages au bâton. Ouch. On notera tout de même quelques satisfactions parmi les joueurs de complément, avec Mitch Moreland qui aura produit plus de points en 79 passages au bâton (.328, 8 HR, 21 RBI) que J.D. Martinez en 237, ou encore Kevin Plawecki, la doublure de Vazquez au poste de receveur et qui aura frappé une belle moyenne de .341 en 89 visites au marbre.
Vous l’avez compris, le seul véritable point positif de cette saison 2020 aura été l’acquisition d’un quatrième pick de draft en 2021. Pour le reste : rideau !
La saison 2021 :

Photo By Christopher Evans/MediaNews Group/Boston Herald
Bon on ne va pas se mentir, la saison 2021 devrait ressembler à 2020 pour nos amis de Boston. La plus grosse upgrade par rapport à la saison dernière, c’est le retour sur le banc de l’homme qui a emmené le club au titre en 2018, Alex Cora, après sa suspension d’une année suite aux révélations du système de triche des Astros, dont Cora a été le bench coach durant les années suspectes. Il est apprécié des fans, des joueurs et du front office, et son retour est très attendu. Il revient comme le messie et cela pourrait avoir un impact bénéfique sur le clubhouse et donc sur le niveau de l’équipe. Et Boston va avoir besoin des poubell… de la magie de son coach. Car et pour une fois il n’y a pas eu de breaking news sur les Red Sox au rayon des transferts.
On pourra noter tout de même le départ controversé d’Andrew Benintendi, joueur dans le dur mais encore au gros potentiel. Ce dernier est envoyé chez les Royals en échange notamment de Franchy Cordero, qui a une grosse puissance mais qui manque de régularité. Mais s’il n’y a pas eu de gros mouvement, le Front Office a pourtant bien mis les mains dans le cambouis avec une multitude d’arrivées plutôt intéressantes pour approfondir la profondeur de l’effectif. Ainsi des joueurs comme Marwin Gonzalez, Hunter Renfroe, le lanceur Martin Perez ou encore le couteau suisse ultime Enrique “Kike” Hernandez porteront la tunique rouge. Des arrivées intelligentes mais qui ne vont pas bouleverser l’ordre établi de cette division Est de l’enfer. Le message semble clair de la part de Chaim Bloom et ses collègues, on mise sur un retour en forme des stars qui ont sous-performé dans cette saison 2020, disons particulière. Mais bon difficile de voir un monde où Boston se qualifie pour la postseason surtout quand on voit la force de frappe de Tampa, New-York et Toronto.
Et certains commencent même à se dire que Baltimore pourrait une nouvelle fois terminer devant les Red Sox. Ce qui serait assez dramatique. Officiellement, on est pas encore dans un rebuild mais dans les actes ça y ressemble fortement. Après difficile dans un club comme Boston d’évoquer le tank mais il faudrait surement passer par là afin de retrouver les Red Sox sur les devants de la scène. Mais quand on voit la montée en puissance des Blue Jays et des Orioles, difficile de trouver un créneau. Surtout qu’après cette saison, le club n’aura plus que Chris Sale et Xander Bogaerts sous contrat longue durée. Il faudra donc les surveiller car ils pourraient être sur le départ, notamment Bogaerts. Bref vous l’avez compris, ca va être une saison galère pour Boston,
Le joueur à suivre : Alex Verdugo (OF)
Débarqué dans le Massachusetts en février 2020 en provenance de la côte ouest, Alex Verdugo fait petit à petit son trou dans le paysage Bostonien. Arrivé sans être réellement désiré par les fans des Red Sox, le pari était loin d’être gagné. Eux qui voyaient partir Mookie Betts, David Price et des valises pleines de cash aux Dodgers contre Wong, Downs, notre fameux Verdugo et deux paquets de skittles avaient toutes les raisons du monde d’en vouloir à John Henry, le riche propriétaire des BoSox.
Pourtant, force est de constater qu’après un an, s’il y a bien une monnaie d’échange dans ce trade, elle se nomme Verdugo. Sur la saison taillée XXS de 2020 pour les raisons que l’on connaît, il a frappé avec plus de régularité (.308 avg) que chacun de ses coéquipiers (minimum 100 passages). En American League il se classe même 5e. Véritable métronome du lineup, il est aujourd’hui le baromètre du roster. Sa régularité est sa force ce qui en fait un joueur très souvent sur bases. Ses 36 runs font de lui le plus gros scoreur de Boston version 2020 et ses 62 Hits le classent dans les dix meilleurs frappeurs d’American League, une fois encore.
Bref, pour une première saison passée à devoir faire oublier l’un des trois meilleurs joueurs au monde, le bilan aurait pu être bien pire… Il est même plutôt très bon pour un joueur que l’on n’attendait pas forcément si vite à ce niveau.Sa saison 2020 lui aura même permis d’accrocher un top 15 au MVP où il s’est classé 12e. Qui aurait parié dessus, fin février quand on voyait la gueule du trade ? Pas grand monde, soyons honnêtes. Utilisé aussi bien dans le corner du champ gauche (22 matchs) qu’en champ droit (31 matchs), Alex Verdugo est aujourd’hui un outfielder titulaire indiscutable doté d’une puissance de bras assez phénoménale.
Bref, bien que la perte d’un MVP comme Mookie Betts a évidemment fait du mal à Boston, notons qu’avec Verdugo, le board a tout de même réussi à ramener un outfielder capable d’amener constance, présence et assiduité au bâton. A tel point qu’aujourd’hui, Alex Cora devrait le confirmer comme leadoff. On sait la préférence du joueur pour le rôle de 2-hole hitter et la faculté de Cora à alterner son alignement mais cela reste tout de même révélateur. Un an après, Verdugo fait sa place au soleil.
La star : Rafael Devers (3B)

C’est un secret de Polichinelle, Rafael Devers a l’un des swings les plus compliqués du baseball professionnel. De ce fait, lorsqu’il connecte avec la balle, c’est toute la défense adverse qui est mise sous pression. Cela n’engage que TSO, mais il gagnerait sans doute à être plus patient une fois dans la boîte. Faire augmenter le compte du lanceur adverse en devenant un frappeur au sang froid ferait sans conteste du jeune dominicain une menace offensive encore plus redoutable.
Lorsque vous avez une force comme Devers, il est normal de s’élancer assez rapidement. On rappelle que les puissants frappeurs sont plutôt agressifs et peu disposés à « attendre la bonne ». Cela peut donner de très bons résultats comme en 2019 où il termina avec un total de 359 bases sur l’année, ce que personne n’atteint cette saison-là. Cependant, aussi grandes soient la puissance et la vélocité d’un Devers avec des balles frappées en moyenne à 93 mph l’an passé, il lui reste des axes de progression. Sans parler de la défense, on y reviendra, le principal étant cette fameuse patience qu’il semble avoir du mal à acquérir et qui lui permettrait de gratter beaucoup plus de walks par exemple (seulement 13 BB l’an passé et 48 il y a deux ans). Trop peu pour un joueur de son calibre.
Malgré tout, Rafael Devers, est depuis le départ de Mookie LA star de cette équipe. On aurait pu citer le retour de Cora ou dans une moindre mesure de Sale mais l’âme de cette équipe semble aujourd’hui être incarnée par le 3e Base des chaussettes rouges. Parmi les leaders depuis maintenant deux ans que ce soit en HR ou RBI, il est l’arme numéro un de Boston, celui par qui la foudre peut tomber à tout moment. Mais aujourd’hui il doit passer un cap pour viser encore plus haut. Parce qu’il en a le potentiel et qu’il serait dommage de s’en priver.
Il n’a jamais fait un top 10 au MVP, ne compte aucune distinction personnelle et attend toujours son tour pour être convié à la grande messe du All-Star Game. La montée en puissance des Red Sox passe forcément par lui… et par une meilleure défense ! Car avec 60 erreurs au compteur depuis 2018, Devers enfile tristement le bonnet d’âne des Majeurs. C’est 8 de plus que n’importe qui et c’est beaucoup trop pour un joueur de son standing offensif. Alors Rafael, si tu nous lis, un chouia plus de patience, des BB en hausse et des erreurs en baisse et on ne devrait pas être loin de la progression très attendue chez ce joueur, qui rappelons-le n’a que 24 ans. Patience donc. Le maître mot finalement…
Le prono :
Vous l’aurez compris, sauf miracle, ce n’est pas en 2021 que les Boston Red Sox revivront l’ivresse de la saison 2018. Dans une division aussi dense en effectifs et talents que l’AL East, construire une équipe passable sur un malentendu ne suffit pas pour pouvoir ambitionner le moindre accessit. Les Red Sox ont du talent dans toutes les ligues, cela est indéniable, mais aussi de grosses lacunes dans chacun des domaines du jeu, à commencer par un bullpen qui a tout d’un accident industriel malgré les arrivées d’Ottavino et Andriese. Le retour attendu de Chris Sale sera un boost, sans aucun doute, mais pour Boston, le futur ne s’écrit pas au present ni au futur proche : il passera par la reconstruction d’un farm system performant et des investissements conséquents : rendez vous aux alentours de 2025.
Le Prono de TSO : 78-84
Projection PECOTA : 80-82
Une réflexion sur “Preview 2021 – Red Sox : Le moral dans les chaussettes”