Nous y sommes. Les MLB London Series. Les premiers matchs officiels des Ligues Majeures sur le vieux continent. Et quoi de mieux que de débuter cette nouvelle aventure avec la plus grande rivalité du sport américain, un bon vieux Yankees-Red Sox. Les New-Yorkais et les Bostoniens vont jouer deux parties au Stade Olympique de Londres ce week-end. Mais on anticipe ce double duel entre les Bronx Bombers et les BoSox dans un duel de franchise, réservé généralement aux World Series. Mais la Greatest Rivalry mérite bien ce duel. Alors qui des Yankees ou des Red Sox remportera le duel des franchises ? Avec plus ou moins de mauvaises foi.
Ancienneté
Red Sox : Quand, en 1901, Ban Johnson décide de transformer la Western League en American League pour concurrencer la seule ligue majeure du moment, la National League, il souhaite installer un club à Boston pour concurrencer le club de la NL, les Braves (ceux qui partiront à Milwaukee en 1953 puis Atlanta en 1966). A l’origine, l’équipe devait évoluer à Buffalo mais Ban Johnson préféra finalement miser sur Boston.
Il crée donc ce club en 1901 qui prend le surnom d’Americans. Le club n’aura pas de nom officiel jusqu’à la saison 1908 où le propriétaire du moment, John I. Taylor, décide d’appeler l’équipe « les Red Sox ». Cela fut permis par le fait que, la National League ayant décidé de jouer tous de blanc vêtus, l’équipe de Boston put porter la couleur rouge pour se démarquer des équipes qui avaient porté cette couleur jusque là, les Reds de Cincinnati et les Red Caps de Boston, devenus Braves. Vous suivez ? Parce qu’il faut savoir qu’à l’origine, les Red Stockings étaient l’équipe professionnelle de Cincinnati en 1869, la première de l’histoire du baseball. Puis le nom fut pris par l’équipe de Boston, qui allaient devenir les Braves, quand l’équipe de Cincinnati disparue en 1870 mais quand Cincinnati revient dans le jeu en 1876 avec l’ancêtre de la MLB, ils reprirent leur nom et Boston prit celui de Red Caps. En 1908, l’autre équipe de Boston saute sur l’occasion pour devenir les Red Sox, diminutif de Red Stockings, facilitant ainsi le travail de la presse (comme c’était le cas pour les White Sox à Chicago). De quoi s’y perdre avec ces fourbes de bostoniens.
Yankees : Les Yankees sont créés la même année que les Red Sox, dans le cadre de la nouvelle Ligue Américaine. Mais comme les BoSox, ils ne s’appellent pas encore les Yankees. À vrai dire, ils ne sont même pas à New York. Les plans de Ban Johnson pour créer une nouvelle franchise dans la Grosse Pomme sont bloqués par les New York Giants. Johnson fonde alors un club à Baltimore, les Orioles (qui n’ont rien à voir avec les Orioles d’aujourd’hui évidemment). Le club va vivre deux saisons là-bas, se permettant de piquer bon nombre de joueurs des Giants au passage.
Une conférence de la paix entre les deux ligues permet en 1903 de déménager le club à New York qui prend le nom officiel de Highlanders (plus cool que Americans ou chaussettes rouges). Yankees n’est alors qu’un surnom mais celui-ci ayant les préférences de la presse, il devient le nom officiel du club en 1913.
Résultat : Une même année de naissance devrait amener logiquement une égalité mais les BoSox ont tout de même un petit avantage, leur ville de fondation est toujours celle où ils évoluent, là où les Yankees ont du attendre deux ans pour rejoindre New York, et plus pour rejoindre le Bronx. Point donné à Boston.
Palmarès
Red Sox : Les Red Sox ont connu deux périodes glorieuses et à chaque fois, c’était en début de siècle. Il ont enregistré cinq titres entre 1903 et 1918, dont les premières World Series (en 1903 face aux Pittsburgh Pirates du Flying Dutchman Honus Wagner) et ont dominé le baseball majeur dans les années 1910, notamment grâce à leur jeune star Babe Ruth. Et puis la nouvelle heure de gloire au début du 21ème siècle en brisant la malédiction du Bambino en 2004 puis en remportant les World Series en 2007, 2013 et 2018, ce qui en fait la franchise la plus titrée du siècle naissant et le détenteur du troisième rang pour les victoires en Séries Mondiales, ex-aequo avec les A’s d’Oakland.
Entre 1918 et 2004, ils ont participé à quatre reprises aux World Series sans se défaire de la malédiction. Ils ont tout de même remporté 14 fois la Ligue Américaine. C’est bien. C’est correct.

World Series (9) : 1903, 1912, 1915, 1916, 1918, 2004, 2007, 2013, 2018
American League (14) : 1903, 1904, 1912, 1915, 1916, 1918, 1946, 1967, 1975, 1986, 2004, 2007, 2013, 2018
Yankees : 27. Fin du game.
Vous en voulez plus ? Les Yankees, c’est la franchise la plus titrée du baseball et l’un des palmarès les plus glorieux du monde sportif. 27 World Series. 40 fanions de ligue remportés. Une domination sur le monde du baseball durant 4 décennies des années 20 au début des années 60 puis durant une partie des années 70 et 90/2000. Autant de dynasties qui ont construit l’histoire du baseball comme aucune autre équipe.
World Series (27) : 1923, 1927, 1928, 1932, 1936, 1937, 1938, 1939, 1941, 1943, 1947, 1949, 1950, 1951, 1952, 1953, 1956, 1958, 1961, 1962, 1977, 1978, 1996, 1998, 1999, 2000, 2009
American League (40) : 1921, 1922, 1923, 1926, 1927, 1928, 1932, 1936, 1937, 1938, 1939, 1941, 1942, 1943, 1947, 1949, 1950, 1951, 1952, 1953, 1955, 1956, 1957, 1958, 1960, 1961, 1962, 1963, 1964, 1976, 1977, 1978, 1981, 1996, 1998, 1999, 2000, 2001, 2003, 2009
Résultat : Un feu d’artifice face à une bombe atomique. Une voiture à pédales face à une formule 1. Un enfant de CP face à Connor McGregor dans un octogone. Le palmarès des Red Sox face au palmarès des Yankees. Si les BoSox ont bien garni leur armoire à trophées depuis 2004 pour avoir un des plus beaux palmarès de la MLB, elle est très loin de valoir celle des Yankees. Victoire des Yanks avec KO sur finish spécial.

Hall of Famers
Red Sox : Les Red Sox comptent 37 joueurs Hall of Famers (aucune manager ou propriétaire) qui ont évolué dans le club dont 14 introduits au Temple de la Renommée avec la casquette des Red Sox. Cela classe les BoSox au 5ème rang des équipes MLB en la matière.
On trouve parmi ces 14 joueurs quelques uns des plus grands joueurs de tous les temps comme Ted Williams (un des tous meilleurs frappeurs de l’histoire de la MLB), Carlton Fisk, Jimmie Foxx ou, plus récemment, Pedro Martinez. Les autres, du lourd : Joe Cronin, Herb Pennock, Wade Boggs, Jimmie Collins, Happy Hooper, Rick Ferrell, Bobby Doer, Lefty Grove, Jim Rice et, bien entendu, l’imprononçable Carl Yastrzemski. Le prochain à rejoindre cette liste impressionnante sera probablement David Ortiz.
Parmi les autres HoF passés par Boston : Tom Seaver, Cy Young, Rickey Henderson, Juan Marichal, Luis Aparicio ou encore… Babe Ruth !
Côté commentateur, le légendaire Curt Gowdy fut également introduit au Hall of Fame par le trophée Ford C. Frick au nom des Red Sox.

Yankees : Côté Bronx Bombers, on ne sera pas étonné d’exploser tous les records avec 60 joueurs, managers ou propriétaires passés par le club qui ont été introduits au Hall of Fame. 23 l’ont été avec la casquette des Yankees dont 18 joueurs. Soit le meilleur total de la MLB.
Si la liste des BoSox est impressionnante, celle des Yankees est hallucinante. Elle possède le meilleur joueur de tous les temps, Babe Ruth, et d’autres joueurs considérés comme le top du top du top : Lou Gherig, Joe DiMaggio, Yogi Berra, Mickey Mantle, Mariano Rivera. Derrière, on complète la liste avec Tony Lazzeri, Bill Dickey, Jack Chesbro, Earle Combs, Whitey Ford, Lefty Gomez, Waite Hoyt, Goose Gossage, Joe Gordon, Red Ruffing, Reggie Jackson et Phil Rizzuto. En attendant le Captain, Derek Jeter.
On citera pour votre culture personnelle d’autres grands noms passés par les Bombers : Dave Winfield, Herb Pennock, Rickey Henderson, Catfish Hunter, Phil Niekro, Tim Raines, Ivan Rodriguez, Mike Mussina, Randy Johnson ou encore Johnny Mize.
A cela, il faut ajouter le propriétaire Jacob Ruppert qui fit des Yankees dans les années 20 la première force du baseball, en achetant notamment Babe Ruth et les autres stars des Red Sox entre 1920 et 1923. Autre dirigeant élu, George Weiss, qui fut directeur du farm-system puis General Manager des Yankees de 1932 à 1960, grand artisan de la domination des Pinstripes. Et enfin, quatre managers légendaires des belles années Yankees : Joe McCarthy, Casey Stengel, Miller Huggins et Joe Torre.
Pour les récipiendaires du trophée Frick, trois élus : Red Barber, Buck Canel et surtout le mythique Mel Allen.

Résultat : Plus de joueurs élus, des dirigeants et managers, le meilleur joueur de tous les temps suivis des plus grands noms du baseball. Ce duel fut décidé quand Babe Ruth quitta les Red Sox pour les Yankees en 1920. KO centenaire. Yankees win.
Impact sportif
Red Sox : L’histoire sportive des Red Sox fut compliquée, digne des montagnes russes. Elle commence merveilleusement bien avec la Golden Era de 1901 à 1919. Deux ans après leur création, ils remportent les premières World Series de l’histoire puis domine le baseball majeur dans les années 1910 avec 4 titres de champions et l’émergence de la star Babe Ruth. La vente du Bambino et d’autres joueurs aux Yankees à partir de 1920 va déplacer définitivement le centre du baseball à New York. C’est le début de la malédiction. Les BoSox connaîtront de belles saisons en 1946 (Ted Williams Era), 1967 (Carl Yastrzemski, Tony Conigliaro et The Impossible Dream), 1975 (Carl Yastrzemski, Carlton Fisk et la Red Hat Era) et 1986 (avec l’erreur mythique du regretté Bill Buckner en World Series) mais sans parvenir à l’emporter.
Il faudra attendre 2004 pour voir la malédiction s’envoler et les Red Sox quitter majestueusement l’ombre des Yankees en faisant tomber ces derniers dans des finales de l’Américaine totalement folles. Depuis, les Red Sox ont remporté trois autres World Series, faisant des Bostoniens l’équipe la plus titrée du 21ème siècle, avec le sommet de la saison 2018 (108-54), considérée comme l’une des meilleures saisons qu’a produit une équipe MLB en dominant son sujet du début à la fin.
Yankees : Les Red Sox ont connu de grandes saisons et nombreux placent celle de 2018 dans le top 10, tant les BoSox ont dominé leur sujet. Problème : les Yankees ont fait mieux et ceux plusieurs fois.
Les Yankees ont tout d’abord outrageusement dominé le baseball des années 20 aux prémices des sixties, remportant 20 World Series durant cette période dont les premiers triplé (1936-1938), quadruplé (1936-1939) et quintuplé (1949-1953). Elle est encore aujourd’hui la seule équipe à avoir réalisé un quadruplé et un quintuplé. Un autre triplé fut réalisé entre 1998 et 2000, période où les Yankees ont de nouveau trôné tout en haut du baseball majeur.
Ces épopées sportives sont rentrées dans la légende et on débat encore aujourd’hui de savoir qu’elle fut la meilleure équipe des Yankees et, in fine, de l’histoire de la MLB. Pour certains, il s’agit du Murderers’ row de 1927 avec Babe Ruth et Lou Gehrig notamment. D’autres évoquent le Fearsome Four de 1939 avec DiMaggio, Bill Dickey, George Selkirk et Charlie Keller, les Yankees des M&M’s Boys en 1961 (Mickey Mantle, Roger Maris et leur fabuleuse course aux homeruns pour battre le record du Babe) et enfin la Nouvelle Dynastie du Core Four et leur saison exceptionnelle de 1998 (Derek Jeter, Mariano Rivera, Jorge Posada et Andy Pettitte). Sans oublier le Bronx Zoo de 1977-1978 ou la Stengel’s Squad de 1951-1959.
De plus, les Yankees ont révolutionné le jeu comme aucune autre équipe. Bien sûr, d’autres franchises ont apporté beaucoup au baseball au niveau sportif. On pense aux Dodgers qui ont ouvert la voie aux joueurs afro-américains avec Jackie Robinson et donc au jeu pratiqué dans les Negro Leagues puis dans les pays latino-américains. Mais les Yankees ont changé radicalement l’histoire du baseball quand, en engageant le lanceur Babe Ruth, ils l’ont repositionné en joueur de champ pour en faire un frappeur à temps complet. Ce dernier s’est donc transformé en power hitter, et à vrai dire, il fut le premier power hitter de l’histoire du baseball moderne.

En 1920, ce changement amène la fin de la Dead Ball Era et le début de la Live Ball Era. Le baseball n’est plus uniquement un jeu défensif et de gagne-terrain mais un jeu de puissance où le duel lanceur-frappeur change de dimension. Le baseball que l’on connaît aujourd’hui est issu directement de ce changement et ce sont les Yankees qui en sont à l’origine.
Les Yankees devinrent tellement dominants qu’ils finirent par faire fuir les deux équipes historiques de la ville, les Giants et les Dodgers, qui préférèrent tenter la ruée vers l’or en Californie dans les années 50, modifiant à jamais le visage de la National League et des Ligues Majeures.
Résultat : Je voudrai dire ici toute ma compassion pour la Red Sox Nation mais, avouons-le, c’est un massacre. C’est même une annihilation. Si les performances des Red Sox sont rentrées dans la culture populaire (voir plus bas), sur le plan purement sportif, on parle de deux équipes qui ont évolué dans des univers différents. Les Yankees ont dominé et réinventé le baseball. Ils l’ont sublimé à de maintes reprises. La belle saison 2018 des BoSox est une belle ligne dans le livre d’histoire de la MLB, là où les épopées des Bronx Bombers constituent les meilleurs volumes de cette histoire.
Poids économique
Red Sox : Si les partisans des BoSox aiment se plaindre de la richesse insolente des Yankees et de la modestie de leur équipe, ils oublient de dire qu’ils sont la troisième franchise MLB en valeur économique (3,2 milliards $) et en revenus (516 millions $). En gros, c’est aussi une équipe de riches et leur saison 2018 est aussi due à des dépenses folles en matière de salaires pour créer une équipe surpuissante.
Au classement économique établi par le magazine Forbes, les Red Sox talonnent le numéro 2, les Los Angeles Dodgers. S’ils n’ont pas le marché de New York et de LA, ils profitent d’une région passionnée de sports et qui excelle dans les quatre sports majeurs depuis le début des années 2000, créant une émulation entre toutes les équipes (Patriots, Bruins, Celtics) et les fans. De plus, leur histoire ancienne, leur rivalité avec les Yankees, l’aura de Boston en fait une équipe dont le merchandising est l’un des plus rentables du baseball et au-delà (il suffit de voir le nombre de casquettes des Red Sox sur les têtes françaises). De plus, Fenway Park, qui a l’une des plus petites capacités des Majeures, possède tout de même la 8ème meilleure affluence de la MLB (les BoSox ont joué à guichets fermés de 2003 à 2013 soit durant 820 matchs) et leurs matchs retransmis à la télévision sont au 4ème rang des audiences TV dans le baseball.

Yankees : Oui, the Evil Empire est blindé de pognons. Normal pour la franchise qui domine le classement MLB en valeur économique (4,6 milliards $) et revenus (668 millions $), loin devant son dauphin de Los Angeles (Les Dodgers, pas les Angels, soyons sérieux). Une puissance économique due au premier marché sportif d’Amérique avec New York et à la ville elle-même dont l’équipe est devenue le symbole, s’exposant sur des millions de casquettes (en autres) à travers le monde depuis des décennies. Autant de rentrées d’argent qui accompagnent la troisième affluence au stade de la MLB et le premier rang au niveau des retransmissions TV.
Tout ceci permet aux Yankees de dominer le baseball et même le monde sportif, sa valeur étant la deuxième au monde derrière les Dallas Cowboys (NFL) et devant les cadors du football que sont les Real Madrid, FC Barcelone et Manchester United (je n’ai pas parlé du PSG car je parle des cadors), ou encore les équipes NBA (la première étant les Knicks de NY, 4ème ex-aequo avec Barcelone).
Résultat : Deux équipes riches mais les Yankees le sont plus. Ils sont l’équipe de baseball la plus connue au monde, en dehors des fans du jeu, et le symbole de New York, un avantage marketing indéniable. Elle est la seule franchise MLB à dominer les clubs de football et seuls les Dallas Cowboys de la NFL font mieux. Même les franchises NBA ne font pas le poids. Les Red Sox sont un poids lourd du sport américain. Les Yankees sont un mastodonte du sport mondial. Pas besoin de suivre les cours de la bourse à Wall Street pour savoir qui est le vainqueur de ce duel économique.
Impact dans la culture populaire
Red Sox : Aux États-Unis et dans le monde du baseball, il y a les fans des Yankees et le reste du monde. Les autres. Les haters. Si on n’est pas fan des Yankees, on se doit de les détester. Cela est encore plus vrai pour la Red Sox Nation dont les fans sont les porte-étendards de la haine anti-Yankees.
Ce rôle, ils le doivent à la rivalité entre les deux clubs, elle-même nourrie de la rivalité entre les villes de Boston et de New York dont je vous ai parlé ici. Cette rivalité, la rivalry, a dépassé le cadre du sportif et du rationnel pour devenir surnaturel avec la malédiction du Bambino. La vente de Babe Ruth aux Yankees plongea les Red Sox dans 86 années de malheur où la victoire finale en World Series, malgré des générations dorées, leur échappa, avec parfois des situations proprement extraordinaires qui ont bâti la légende de la MLB. On pense bien entendu à l’erreur de débutant de Bill Buckner contre les Mets en 1986 qui offrit la victoire aux autres new-yorkais. À la blessure du grand espoir Tony Conigliaro et à la Une de Sports Illustrated devenue mythique. À ces maudits Yankees raflant la gloire et barrant la route des Red Sox à la moindre occasion.
Tout ceci a bâti une mythologie de lovable losers, à l’instar des encore plus maudits Cubs de Chicago (jusqu’en 2016). Une position d’opprimé face à l’Evil Empire Yankees, qui donna une place à part à la franchise dans le sport américain et l’une des fanbases les plus importantes et impliquées. Fenway Park, l’un des plus anciens ballparks des Majeures, avec son mythique Green Monster et sa mascotte Wally le Green Monster, est à lui seul un monument du sport US.
Les Red Sox ont ensuite transformé cette image d’opprimé en David renversant Goliath quand ils sont revenus d’un déficit de trois matchs perdus et d’une élimination imminente en 9ème manche du match 4 des finales de l’Américaine face aux Yankees pour finalement l’emporter quatre matchs à trois. Un des grands moments de la rivalité et du sport américain qui a fait des Red Sox une équipe de gagnants.
Ce passage d’un statut de losers du sport US à celui de vainqueur miraculé est très bien décrit dans le seul film où les Red Sox sont en vedette, la comédie romantique Fever Pitch (Terrain d’Entente), avec Jimmy Fallon et Drew Barrymore. L’occasion d’en apprendre beaucoup sur l’histoire des BoSox et d’entendre le stade chanter le célèbre Sweet Caroline de Neil Diamond, un des hymnes officieux de Fenway.

Yankees : Du côté du Bronx, la rivalité eut une tout autre saveur jusqu’en 2004, la saveur de la gloire et d’une gloire sans partage. Tandis que les Red Sox allaient de désillusions en désillusions, les Bronx Bombers accumulaient les titres et leurs joueurs de légende devenaient des demi-dieux de la mythologie américaine de Babe Ruth à Derek Jeter, en passant par Lou Gherig, Joe DiMaggio, Mickey Mantle et Mariano Rivera. Chacun d’entre-eux représentaient plus que lui-même ou que le baseball. Ils furent une sorte de photographie de la société américaine, réelle ou fantasmée. L’appétit de Babe Ruth pour les records, la nourriture, les femmes et la joie de vivre représenta les années folles. Lou Gherig fut un modèle comme plus tard Mickey Mantle, Derek Jeter et Mariano Rivera à des périodes où les États-Unis se cherchaient des repères de vertu face aux ténèbres. Ces personnalités dépassèrent le cadre du baseball et cela fit des Yankees plus qu’un club, particulièrement des années 20 aux sixties, alors que le baseball était une religion interconfessionnelle pour tous les américains et le Yankee Stadium sa première église.
Ceci marcha également pour leurs dynasties sportives qui rentrèrent dans le panthéon de la mythologie américaine, du Murderers’ row de 1927 au Core Four de 1998. On pense souvent aux Fearsome Four de 1939, aux M&M’s Boys de 1961 mais n’oublions pas le Bronx Zoo de 1977/78 où les Yankees retrouvèrent les joies de la victoire après une décennie de disette alors que la ville de New York vivait l’une des périodes les plus sombres de son histoire entre criminalité galopante, faillite de la ville et misère sociale.

Cette longue domination, bien aidée par des moyens financiers plus importants que les autres franchises, fit des Pinstripes l’Empire du Mal, The Evil Empire, notamment à partir des années 50 (Damn Yankees). Les Yankees acceptèrent ce rôle et aujourd’hui encore s’en amusent dans leur communication, reprenant l’univers de Star Wars. Ce rôle, à la fois d’opposant maléfique et de club numéro 1, au centre de l’Histoire et des légendes, a permis aux Yankees de truster les références dans la culture populaire, le cinéma, la télévision, la littérature.
Les Yankees est l’équipe qui a le plus investi le monde du cinéma avec des films comme 61* de Billy Crystal (sur l’année 1961 des M&M’s Boys et le record contesté de 61 homeruns de Roger Maris), The Pride of Yankees avec Gary Cooper (sur la vie de Lou Gehrig), Gentleman Babe avec John Goodman (sur qui vous savez), La Révélation avec Brendan Fraser, Bronx is Burning ou encore Bang the Drum Slowly avec Robert De Niro où l’équipe des NY Mammoths s’inspire des Yankees. C’est aussi l’équipe préférée pour être l’antagoniste des films de baseball. C’est le cas dans Major League, Rookie of the Year ou encore For the Love of the Game.
Que ce soit ses équipes ou ses joueurs de légende, le club du Bronx a également inspiré la littérature, la musique et bien d’autres formes d’art. On pourrait aussi parler Joe DiMaggio et Marylin Monroe ou du discours de retraite en 1939 d’un Lou Gehrig condamné à mort par la SLA, qu’on appelle ici maladie de Charcot mais qui prend le nom de maladie de Lou Gehrig outre-Atlantique (« je me considère comme l’homme le plus chanceux à la face du monde »). Autant de moments qui ont dépassé le cadre du monde sportif pour écrire la mythologie de la nation américaine.
Résultat : Red Sox et Yankees sont des monuments de la culture populaire américaine. Néanmoins, les Red Sox doivent une grande partie de leur aura dans cette culture à leur rivalité avec les Yankees, là où les Bronx Bombers ont existé au-delà cette rivalité, en contribuant à l’histoire et à la mythologie de l’Amérique. C’est pour cela qu’ils ont investi le champ culturel en tant que mythe, héros, antagoniste, modèle de réussite et empire du mal, comme miroir, déformant parfois, de la société américaine. BoSox, tu peux pas test !
Verdict
Les faits, rien que les faits. Les Yankees sont là-haut, tout là-haut. Ne regardez pas, vous allez vous faire mal au cou. C’est la plus grande, la plus glorieuse, la plus puissante et la plus mythique des franchises. Ils sont sur un autre plan d’existence. Ce match des franchises, ils le remporteraient contre n’importe laquelle des franchises MLB (ils vont d’ailleurs la remporter contre les Dodgers en octobre prochain comme les World Series). Les Red Sox font partie du club très fermé des franchises qui peuvent tutoyer légèrement le mythe Yankees. D’ailleurs, comme dit plus haut, ils doivent une grande partie de leur aura à cette rivalité. Mais, au final, ce sont les Yankees qui l’emportent comme New York finit par l’emporter sur Boston pour être la ville numéro 1 de l’Amérique.
L’histoire des Yankees n’a pas seulement suivi le cours historique américain, elle y a contribué, bâtissant une mythologie, participant à la fabrique de l’Amérique actuelle, en bien comme en mal. C’est parce qu’ils sont plus qu’une franchise de baseball que les Yankees sont au-dessus. Bref, c’est un massacre intersidéral comme le début de saison des Red Sox. Yankees win et bonnes London Series.
