
Des surprises, du tapis vert, des déceptions et des grosses écuries chahutées mais toujours devant, l’édition 2018 du Challenge de France aura été à l’image du début de saison en championnat. Même le favori Rouen, finalement vainqueur en reprenant, en finale, le trophée des mains de Sénart, tenant du titre, a été bousculé, passant proche d’une élimination en demi-finale. Retour sur un Challenge de France qui pourrait avoir livré quelques enseignements pour la suite de la saison et l’avenir de la D1.
Un top 4 malmené mais toujours debout… ou presque !
La compétition n’aura pas été de tout repos pour le top 4 actuel du baseball français. Si Rouen, Montigny, Sénart et Montpellier ont connu des fortunes diverses dans ce Challenge, aucun n’a pas évolué tranquillement. A commencer par le champion de France, Rouen.
Les Huskies sont arrivés au Challenge avec quelques doutes suite à deux partages en championnat face à Savigny et Montigny. Après une victoire facile face à La Rochelle (10-0), les Huskies ont chuté une nouvelle fois contre Montigny (3-7), peu aidés par une équipe rajeunie pour cause d’indisponibilité professionnelle de quelques cadres (ah les affres du sport amateur) mais surtout victimes de Cougars solides. Direction un inhabituel match 3 face à La Rochelle de nouveau, rencontre qui a tourné au carnage (3-22).
Les normands ont alors retrouvé les surprenants Lions de Savigny en demi-finale. Une demi-finale maîtrisée par les Lions pendant 7 manches et que les Huskies ont pu prolongé en extra-inning grâce à grossière double erreur des savigniens en 8ème. Après cela, les Huskies ont fait parler la qualité offensive de leur roster pour enchaîner 4 points en 10ème manche et l’emportaient 7-3. Le plus dur était fait pour Rouen qui a ensuite disposé de Sénart en finale 13-5. Après une première partie de match serré, Rouen s’est envolé au score, remportant son 9ème Challenge de France. Bien que chahuté, Rouen a démontré que son atout numéro 1 était son pitching staff qui lui permet d’aller loin sur des séries. Indispensable en playoffs.
Le rouennais Dylan Gleeson est le MVP du Challenge de France de Baseball 2018 ! @rouenbaseball76 pic.twitter.com/VBQmIauois
— FF Baseball Softball ⚾ (@FFBS_BASEBALL) 13 mai 2018
En revanche, ce ne fut pas le cas des autres équipes du top 4, à commencer Montigny. Bien qu’arriver en demi-finale soit un succès pour les Cougars, il est décevant de voir qu’ils ont implosé à ce niveau-là (défaite contre Sénart 6-18) malgré un pitching staff peu entamé en phase de poule (victoires 10-0 contre le PUC et 7-3 contre Rouen) et arrivant au Challenge avec le meilleur ERA collectif de D1.
Montpellier également. Surpris d’entrée par Savigny (6-9), les Barracudas se sont relancés face à des Ducks de Saint-Just impuissantes (16-2). Hélas pour le leader de la D1, le troisième match les opposa à Sénart, également victime de Savigny. Résultat, un match do or die dantesque où les deux équipes se sont rendues coup pour coup à mesure que le soleil déclinait et que l’enjeu du match devenait de plus en plus dramatique. Un match quasi-poétique en somme, duquel sont sortis vainqueurs les Templiers de Sénart (10-11).
Sénart justement avait commencé en disposant de Saint-Just (15-5) après un début de match où ils se sont fait surprendre (5-1 après 3 manches pour les Ducks). Puis, comme Montpellier, Sénart a été victime des Lions de Savigny (6-7) avant de gagner le fameux match do or die, éliminant les Barracudas. Après cela, les sénartais ont montré deux visages : celle d’une équipe impériale offensivement contre Montigny en demi-finale puis limitée face à Rouen en finale. Sénart, vainqueur du Challenge en 2017, n’aura pas réussi un back-to-back et a montré qu’ils leur manquent toujours un petit quelque chose pour prendre le meilleur durablement sur Rouen.
Savigny, la belle surprise du Challenge
Les Lions ont constitué la principale source d’animation du tournoi. Premièrement, les Lions ont réussi à prendre le meilleur sur les deux finalistes 2017, Sénart et Montpellier, avec des victoires d’un petit point seulement, forçant ces deux prétendants au trophée à s’affronter dans un match éliminatoire passionnant. Puis les Lions sont passés tout proche de sortir Rouen en demi-finale. Savigny a maîtrisé l’attaque rouennaise jusqu’en 7ème, grâce notamment à un excellent Lilian Amoros dans les cinq premières manches, menant 2-0, s’acheminant tranquillement vers un exploit.
Puis, en 8ème, avec bases pleines et deux retraits, une frappe de Luc Piquet facilement gérable pour un dernier retrait, se transforme en double erreur permettant à Rouen de mener 2-3. Mais Savigny répond en dernière manche avec un homerun de Yeixon Ruiz et voilà les équipes en extra-inning. Malheureusement, le mal est fait et Rouen s’impose finalement, les Lions pouvant s’en vouloir d’avoir donné le match aux champions de France.
Néanmoins, Savigny a confirmé son bon état de forme. Le très bon recrutement étranger (Ruiz, Lourey, Mansfield) a permis aux Lions de passer un cap cette saison et Savigny jouera un rôle dans le classement du top 4 par sa capacité à gagner contre toutes les équipes du top 4.
En fin de classement, bonjour tristesse !
Qu’en est-il du trio de fin : PUC, La Rochelle, Saint Just Saint Rambert ?
Le PUC a connu un Challenge compliqué sur le terrain (défaite 10-0 contre Montigny) et surtout en dehors. Pénalisé par une amende pour non présentation à la réunion technique, les pucistes ont vu leur recrue américaine Casey Rihn non qualifiée pour le tournoi puis leur victoire face à La Rochelle 10-6 s’est transformée en défaite sur tapis vert (9-0), synonyme d’élimination du tournoi pour l’utilisation non-conforme d’un joueur 18U. Malmené sur les terrains depuis plusieurs semaines, le PUC avait l’occasion de se relancer avec cette victoire sur les Boucaniers mais l’élimination administrative pourrait couper tout élan.
La Rochelle espérait surfer sur ses deux premières victoires en D1 le week-end précédent face au PUC mais ils ont enchaîné les défaites : 10-0 contre Rouen, 10-6 contre le PUC puis, grâce (ou à cause) à la victoire sur tapis vert contre les parisiens, une nouvelle défaite 22-3, dans le match do or die face aux Huskies. Les Boucaniers ont perdu et perdu lourdement, démontrant la faiblesse de leur pitching. Dur apprentissage pour le promu.
Enfin, les Ducks n’ont tout simplement pas existé ou seulement lors des trois premières manches contre Sénart lors de la première journée. Deux lourdes défaites qui questionnent tant par rapport aux nombreuses absences de titulaires que du rendement des recrues, notamment Larry Infante, très loin de son niveau.
Quels enseignements tirés du Challenge de France ?
Un Challenge de France ne se gère pas comme les doubles rencontres de championnat mais se rapprochent de la gestion d’une série de trois matchs en playoffs sur un week-end. “Pitching is the name of the game”. Pour remporter des matchs très rapprochés, il faut un pitching staff alliant la qualité à la quantité. À ce jeu, Rouen a démontré qu’il avait une longueur d’avance. Au contraire, Montigny, meilleur ERA collectif de D1 actuellement, a démontré que leur pitching n’était pas aussi solide. Si Yorfrank Lopez est un ace redoutable, les Antoine Rault, Maximin Monbeig et Maxence Esteban doivent gagner en constance dans les grands rendez-vous pour faire franchir un cap aux Cougars.
À Sénart aussi, il va falloir se poser des questions. Robert Palencia et Legra Perez ne donnent pas l’impression d’être les « imports » aces dominants dont les Templiers ont besoin pour aller chercher un nouveau titre de champion de France. Ils vont devoir élever leur niveau de jeu sur le monticule, surtout que Matthieu Brelle-Andrade a connu de grosses difficultés dans ce Challenge comme Pierrick Lemestre et Clifford Heberden. Le départ de Jonathan Mottay a fait du mal à la rotation des Templiers.
Montpellier n’est pas sorti des poules. Le leader actuel du championnat devra aussi se poser des questions. Ses deux meilleurs lanceurs au tournoi étaient les jeunes Yoan Antonac et Meylian Marin. Il serait risqué de tout miser sur la jeunesse mais les anciens, Laurent Andrades et Thomas Meley ont galéré tandis que Jeremy Young ne domine pas son sujet. Pas mauvais mais pas excellent non plus, pas assez pour aller chercher Rouen et le championnat.

En démontrant des qualités en attaque et au monticule, Savigny s’est positionné comme l’empêcheur de tourner en rond de la D1. Si sa défense lui a coûté une place en finale, Savigny a montré que les équipes du quatuor de tête ne pouvaient se reposer sur leurs lauriers. Les Lions ont montré que leur place cette saison étant en prédateur du top 4 tandis que La Rochelle, le PUC et Saint Just semblent promis à végéter en queue de peloton.
Bien qu’ayant fait de beaux recrutements sur la papier, ces trois équipes ne décollent, en raison d’un pitching trop juste pour la D1, et ce Challenge de France a semblé mettre en lumière le véritable écart de niveau avec les cinq autres équipes du championnat. Vont-elles confirmer cette tendance lors des prochaines journées de championnat ?
Si ce Challenge de France, organisé de mains de maître par les clubs de Valenciennes et Compiègne, aura été passionnant à suivre avec quelques belles surprises et des matchs d’anthologie, comme Montpellier-Sénart (10-11) et Savigny-Rouen (3-7), il a aussi une nouvelle fois montré l’écart de niveau entre toutes les équipes de D1. Alors que la première division nationale passera à 12 la saison prochaine, le Challenge de France va devoir repenser sa formule.
Il sera impossible de caser douze équipes sur un tournoi de quatre jours mais, il serait peut-être préférable de réduire le nombre de participants pour créer un nouveau Challenge plus compétitif et forcer les équipes du bas de tableau à élever leur niveau de jeu pour espérer y participer. Ainsi, le Challenge sera une carotte pour tirer vers le haut le jeu des équipes, notamment avec l’arrivée de quatre équipes de D2, et éviter une expansion de la D1… vers le bas.
Vous pouvez retrouver le replay des matchs sur la page Facebook du Challenge de France avec en plus les commentaires en direct video de notre journaliste Martin “Keuchel” Casamatta