Le Challenge de France, compétition regroupant les clubs de D1 française, vient de se dérouler à Rouen et Montigny. Les Templiers de Sénart ont décroché le titre et un billet pour la Coupe d’Europe 2018. Promus dans l’élite, les Ducks de Saint-Just Saint-Rambert ont eux profité de la compétition pour signer leur première victoire de la saison. Après des premiers mois difficiles, le moral et la motivation sont là pour réussir de belles perfs lors des prochaines rencontres. Challenge de France, débuts en D1, line-up latino, structuration du club, objectifs… Hervé Soleilhac, le coach par intérim des Ducks, se confie à The Strike Out.

The Strike Out : Les Ducks viennent de décrocher leur première victoire contre une équipe de D1 à l’occasion du Challenge de France. Qu’as-tu ressenti à la fin du match ?
Hervé Soleilhac : Beaucoup d’émotion, de fierté pour ce groupe qui se bat depuis sept journées pour obtenir cette première victoire. J’ai aussi eu une pensée pour toutes les personnes qui ont contribué de près ou de loin à la construction de cette équipe et de ce projet depuis 2015.

Zéro victoire en D1, menés 7-0 après une manche contre le PUC… comment avez-vous trouvé la force mentale pour marquer 9 points dans la 9e manche pour l’emporter ?
H.S : Ce n’est pas la première fois que l’équipe se retrouve dans cette situation à courir après le score, mais dès la première manche avec 7 points de retard c’était plutôt mal engagé. On avait fait volontairement un peu l’impasse au pitching sur le match de la veille contre Rouen même si nos lanceurs ne leur accordent au final que 4 hits en 6 manches. L’objectif était bien de débloquer notre compteur de victoire sur le deuxième match et l’équipe n’a jamais baissé les bras en restant soudée dans la difficulté. A la vue du score c’est un peu une “remontada” d’une équipe latino face à une équipe parisienne.
Effectivement, l’effectif est composé de beaucoup de joueurs étrangers, comment ça se passe sur le terrain ? leur intégration ? et quelle relation entretiennent-ils avec les joueurs français ?
H.S : C’est un réel plaisir d’avoir à gérer des joueurs ayant une culture baseball forte et d’horizons différents : dominicain, vénézuélien, cubain, franco-américain, franco-canadien, polonais et bien sûr français. Leur intégration s’est très bien passée. Il n’y a qu’une famille sur le terrain, on joue tous pour la même équipe, il n’y a pas de différence de couleur, de religion. Quand on s’écoute, on apprend le baseball de chacun ; la barrière de la langue est parfois un obstacle mais le jeu reste le même. On joue, on construit, on perd et on gagne en équipe, c’est aussi ça la diversité : apprendre et partager avec les autres pour être meilleurs.

Le club découvre la D1 cette saison. L’apprentissage est difficile, comment l’expliques-tu ?
H.S : On savait que l’écart D2-D1 était important et on a mis en place un recrutement en conséquence. La difficulté réside dans la fait que 80% des joueurs ne résident pas en Auvergne-Rhône-Alpes, cela ajoute donc des difficultés logistiques et de fatigue, que ce soit pour les matchs à l’extérieur ou à domicile. On le savait… Il faut juste s’organiser en conséquence. Le club est également en cours de structuration : passer de la N1 en 2015 à la D1 en 2017, tout ne se fait pas en un claquement de doigt. En trois saisons, il faut sensibiliser et faire adhérer les membres du club à ce projet. Le club y travaille au quotidien, mais il n’y a pas que la D1, les équipes réserves et jeunes sont tout aussi importantes même si la D1 demande beaucoup d’énergie.
Malgré les difficultés sportives, cette accession est importante pour l’ensemble du club. C’est un bel exemple pour les plus jeunes et les autres équipes ?
H.S : Oui, elle tire le club vers le haut, même s’il n’était pas prêt. Mais Rome ne s’est pas faite en un jour, il ne faut pas griller les étapes. Avec Clermont-Ferrand on représente la Ligue Auvergne-Rhône-Alpes au plus haut niveau français, on espère donner envie aux autres clubs de la Ligue de gravir également les échelons N2, N1, D2 et pourquoi pas D1. Encore une fois, il faut du temps. Les Ducks n’ont eu leur terrain de baseball fermé et dédié qu’au début des années 2000 et ont gravi les échelons tout au long de ces cinq dernières années. Tout est possible si l’on se fixe des objectifs et que l’on construit sur la durée. La région lyonnaise possède un vivier de clubs et de joueurs devant permettre de construire de belles équipes à l’avenir. Le projet Tréfle peut être un très bon élément déclencheur, mais pour cela il faut que les clubs travaillent tous dans le même sens et ensemble pour le bien de la région et du baseball/softball français en général.
Le match face à Clermont au Challenge de France [note : perdu sur tapis vert en raison d’un problème de qualification d’un lanceur] a illustré les limites de votre rotation. Une situation frustrante j’imagine. Comment y remédier ?
H.S : Sur ce match tout était possible car Clermont était confronté aux mêmes problématiques que nous. Ce match était du bonus pendant lequel nous avons pu tester différentes situations, notamment dans la rotation des lanceurs dans le but de préparer la seconde partie de saison. Gérer une équipe pour le Challenge de France avec quatre rencontres en quatre jours avec les limitations de nombre de lancers pour les Français n’est pas la même chose que gérer un effectif sur une journée classique avec deux matchs. Des choix stratégiques en début de saison n’ont pas donné les résultats que l’on attendait, l’approche est désormais différente même s’il reste encore beaucoup de travail. Cela passe par le recrutement de lanceurs avec passeport français en dehors de l’Europe par exemple. Ceux qui étaient disponibles aux Etats-Unis sont déjà engagés en Summer League depuis leur sortie d’université, d’autres se sont déjà engagés avec d’autres clubs comme Fromental-Houle à Rouen ou Duris à Sénart. C’est certain, Saint-Just Saint-Rambert ça fait tout de suite moins rêver [sourire]. Mais d’autres pistes sont en cours d’exploration…
Que manque-t-il aux Ducks pour décrocher un premier succès en saison régulière ? Celui face au PUC au Challenge est-il un tremplin ? Et quels sont vos objectifs pour les mois à venir ?
H.S : Dans la première partie de saison, trois succès étaient à portée de mains – Clermont, Savigny, Montigny – sans avoir joué le PUC. Ce sont tous nos adversaires directes. C’est certain que la victoire face aux Parisiens débloque l’aspect mental de l’équipe. A nous de ne pas réitérer les mêmes erreurs. On a quelques objectifs intéressants pour cette seconde partie de saison : confirmer le potentiel de l’équipe, gérer au mieux les blessures qui nous handicapent depuis la première journée, débloquer certaines situations extra-sportives et enfin accrocher la 6e place synonyme de maintien. Il y a encore beaucoup de travail à faire… et déjà commencer à préparer 2018.
L’une des petites histoires dans la grande histoire de ce Challenge de France, c’était la présence des trois frères Nicolas dans trois équipes différentes. Clément (avec St-Just) a affronté Colin (Clermont) et Martin (PUC). Le premier répond à nos questions.

The Strike Out : C’était comment de retrouver ses deux frères sur le terrain mais dans des équipes adverses ?
Clément Nicolas : Si l’on m’avait dit qu’un jour je participerai au Challenge de France, je n’y aurai certainement pas cru… mais de là à le partager avec mes deux petits frères c’est juste magique ! Le seul bémol c’est que Colin (avec Clermont) a éliminé ses deux frères ! Je suis bien décidé à prendre ma revanche sur Colin l’année prochaine. En attendant, cette compétition restera l’un de mes meilleurs souvenirs avec les Ducks.

Comment as-tu géré tes émotions ? et notamment quand tu as lancé face à Colin ?
C.N : C’est dur à dire mais sur le terrain ma famille c’est les Ducks. On met ses émotions de côté pour donner le meilleur pour ses coéquipiers et pour ce club qui m’a tant donné depuis 1992. Lorsque Colin est arrivé en face de moi, j’ai soufflé un grand coup, j’étais ému. J’ai eu une pensée pour mes parents qui étaient dans les gradins [note : le papa, Alain Nicolas, est président des Ducks]. Colin est sûrement le meilleur frappeur des frères Nicolas. Il est compacte, puissant et le prendre à la légère, car c’était mon petit frère, aurait été une erreur. Finalement il a remporté notre duel avec un BB, mais ce n’est que partie remise ! Pour ce qui est de Martin, je n’ai malheureusement pas pu l’affronter directement. J’espère l’avoir en face de moi lors de notre prochaine journée de championnat le 11 juin face au PUC.
Que retiens-tu de cette expérience à Rouen ?
C.N : Ce Challenge de France a été une expérience formidable. L’équipe a trouvé la petite étincelle qui nous a permis de remonter au score et l’emporter face au PUC. La suite maintenant, c’est à nous de l’écrire…