World Series ’21 – Braves vs Astros, le match des franchises

Voici le retour du match des franchises. Affiche inédite pour ces World Series 2021, avec ce Braves vs Astros, et une opposition des extrêmes entre une équipe présente à la préhistoire du baseball professionnel et une autre apparue durant l’Expansion Era des années 1960. Deux franchises avec leur part de lumière et d’ombre. Est-ce que cela donnera un match sulfureux ? La réponse ci-dessous.

Match sulfureux ? – crédit : Getty images

Ancienneté

Houston Astros : L’aventure des Astros débute en 1962 durant la vague d’expansion vers l’Est du baseball majeur, jusqu’ici cantonné au Nord-Est des États-Unis. Ils rejoignent la National League en même temps que les New York Mets, un an après les Washington Senators, futurs Texas Rangers, et les Los Angeles Angels du côté de l’Américaine.

Les Astros débutent leur carrière sous le nom de Colt .45s, Texas oblige. Heureusement, ils retrouvent la raison et, au lieu de rendre hommage aux excités de la gâchette du coin, ils se tournent vers les étoiles avec le centre de contrôle de la NASA. En 1965, ils deviennent les Astros et leur nouveau stade, l’Astrodome. On les en remercie.

Débutant dans la division Ouest, ils passent dans la Centrale en 1994 avant de migrer en American League pour la saison 2013, afin de rééquilibrer les divisions de l’Américaine.

Atlanta Braves : Quand on parle des Braves, on ne parle pas d’une équipe ancienne, on parle d’une équipe qui était là aux débuts du baseball pro. Et quand on parle du baseball pro, ce n’est pas simplement depuis 1876 et les débuts de la National League mais bien au début de la ligue qui l’a précédé, surnommée la National Association. La NA débuta en 1871 et les Braves en étaient. Mais à l’époque, ils se font appeler Red Stockings, comme la première équipe pro du baseball, celle de Cincinnati, en 1869.

Pas étonnant puisque le manager de la nouvelle équipe de Boston est celui des fameux Red Stockings de Cincinnati, Harry Wright. Le Père du Baseball Professionnel va emmener avec lui une partie de l’équipe de Cincy et l’idée d’une ligue pro, une première dans le baseball et les sports collectifs modernes.

Derrière, la franchise va changer à de nombreuses reprises de noms (Red Caps, Beaneaters, Doves, Rustlers) avant d’acquérir son nom définitif de Braves en 1912 (histoire à découvrir dans notre article sur les noms et logos amérindiens polémiques dans le sport US). Pas si définitif puisqu’il y aura une parenthèse Bees entre 1936 et 1940. Après ça, les Braves ne changeront plus de nom mais de ville avec Milwaukee de 1953 à 1965 puis Atlanta de 1966 à aujourd’hui.

Résultat : Cela démarre fort pour les Braves qui étaient juste là quand le baseball professionnel organisé en ligue est apparu en 1871. What else ? Peu d’équipes peuvent rivaliser dans cette catégorie. Une seule même, les Cubs, également de la partie en 1871. Gros KO d’entrée pour Atlanta.

Palmarès

Houston Astros : Un championnat en National League (2005), trois en American League (2017, 2019, 2021). Les Astros rayonnent depuis peu mais rayonnent de mille feux dans ces dernières années, avec un titre en 2017. Malheureusement, un titre entaché par un énorme scandale de triche. De quoi le jeter à la poubelle ? Chacun a son avis mais cela jette, en tout cas, une ombre sur le palmarès.

World Series (0,5) : 2017

National League (1) : 2005

American League (2,5) : 2017, 2019, 2021

Atlanta Braves : Les Braves jouent depuis si longtemps que leur palmarès s’en ressent. Ou pas. Niveau championnat de ligue, les Braves ont une belle collection de trophées. Et ils collectionnent aussi pas mal de qualifications en playoffs, avec les wild card et les titres de divisions, notamment grâce à une période faste durant les années 1990 et le début des années 2000. Malheureusement, ces présences en playoffs n’ont donné que trois titres en World Series, ce qui est peu pour une telle franchise.

World Series (3) : 1914, 1957, 1995.

National League (18) : 1877, 1878, 1883, 1891, 1892, 1893, 1897, 1898, 1914, 1948, 1957, 1958, 1991, 1992, 1995, 1996, 1999, 2021

Résultat : Prime à l’ancienneté pour les Braves même si on peut se dire que la franchise aurait dû avoir un palmarès en World Series plus conséquent, notamment avec la domination de leur pitching dans les années 1990. Puis, les Astros n’ont conquis qu’un seul titre entaché de l’infamie de la triche et donc du doute. Ils n’avaient aucune chance.

Hall of Famers

Houston Astros : Les texans ont eu leur lot de légendes dans le club, souvent pour de courts passages mais quand même : Nolan Ryan, Ivan Rodriguez, Léo Durocher, Joe Morgan, Don Sutton, Randy Johnson… Mais combien d’Astros au Temple de la Renommée ? Deux : Jeff Bagwell et Craig Biggio, élus respectivement en 2017 et 2015. Tous nouveaux, tous beaux.

Atlanta Braves : La liste des Hall of Famers passés par les Braves est impressionnante, du Père du Baseball Professionnel Harry Wright à Greg Maddux, en passant par Cy Young, Babe Ruth (qui y finit sa carrière en 1935), King Kelly, Roger Hornsby ou encore Gaylord Perry. Et tant d’autres que je ne peux citer sans risquer une blessure de fatigue aux doigts.

Mais combien à Cooperstown avec la casquette des Braves ? 13 dont un manager en la personne de Bobby Cox. Les douze autres : Hank Aaron, Tom Glavine, John Smoltz, Phil Niekro, Rabbit Maranville, Todd McCarthy, Hugh Duffy, Kid Nichols, John Clarkson, Chipper Jones, Warren Spahn, Eddie Matthews. Du beau monde avec notamment Hammerin’ Hank, l’un des cinq meilleurs joueurs de position de tous les temps.

Hammerin’ Hank, l’icône des Braves

Résultat : Encore une fois, il n’y a pas photo. Déjà, avoir Hank Aaron dans vos Hall of Famers, ça vous place très haut mais les Braves ont aussi d’autres légendes dans leur besace, notamment au pitching. Les Astros ne peuvent pas lutter, tout simplement. Cela vire à la correction.

Impact sportif

Houston Astros : En 2017, ils sont devenus la première équipe à gagner un championnat dans chaque ligue de l’ère moderne, après leur titre de 2005 en NL. Mais la route vers la gloire fut longue et s’est finie dans l’opprobre.

Avec des débuts relativement médiocres, les Astros vont devoir attendre les années 1980 pour commencer à exister durablement dans le haut du tableau de la division Ouest de la NL avant de basculer dans la Centrale en 1994, décennie où les Astros parviennent en playoffs régulièrement sous l’impulsion du Hall of Famer Jeff Bagwell. Il en sera de même aux débuts des années 2000 jusqu’à cette saison 2005 où les Astros s’imposent en finale de la NL face aux Saint Louis Cardinals. Malheureusement, ils seront balayés en Séries Mondiales par les Chicago White Sox. La génération des Killer B’s, dont Martin vous narre l’histoire ici, sera donc mal payée.

Les Astros vont ensuite redevenir une équipe de losers, enchaînant notamment trois saisons à plus de 100 défaites de 2011 à 2013. Leur arrivée au sein de l’American League en 2013 ne semble pas arrêter les saisons de misère. Pourtant, les Astros vont redécouvrir la joie des playoffs dès 2015. On connaît la suite. Depuis, les Astros sont devenus un phénomène et, avec la sortie du livre Astroball racontant leur ascension vers le succès, on peut imaginer que les Astros inventent le Moneyball 2.0 et inspirent les autres équipes.

Seul l’avenir nous le dira… Enfin ça, c’est ce que j’écrivais en octobre 2019. Quelques semaines plus tard, sortez le scandale des Trashtros, le vol de signes à un niveau industriel, jetant une tache sombre et indélébile sur le titre de 2017 et la formule gagnante des Astros. Un scandale qui mettra un astérisque éternel sur leur seul trophée en Séries Mondiales, à moins qu’en 2021…

On peut, tout de même, mettre à l’actif des Astros, leur Astrodome (1965), premier stade couvert de la planète, appelé la huitième merveille du monde. Bâti pour répondre aux exigences climatiques tumultueuses de la région, l’Astrodome va montrer la voie pour révolutionner le sport moderne.

Atlanta Braves : Les Braves n’ont gagné que trois World Series mais les années 1990 ont fait entrer le club dans une autre dimension. Entre 1991 et 2005, le club a gagné à 14 reprises sa division et a atteint cinq fois les World Series. Une sorte de dynastie mal payée avec une seule World Series gagnante en 1995. Si vous avez écouté nos épisodes du podcast En Toute Franchise, vous le savez : dans les années 1990 et début 2000, c’était une quasi-obligation de tomber au moins une fois en playoffs face aux Braves.

Cette période reste remarquable, au-delà du club, pour la domination de son pitching avec tout simplement la meilleure rotation de l’histoire entre 1995 et 1998, grâce à un trio de Cy Young : Greg Maddux, Tom Glavine et John Smoltz. Si vous pensez pitching imprenable dans le baseball, le nom des Braves spécial nineties sera le premier à vous venir à l’esprit.

Sans compter que les Braves auront également été marquants lors de leurs deux premiers titres avec les Miracle Braves de 1914 et une victoire solide face aux surpuissants Yankees en 1957.

Résultat : Si vous pensez Astros et victoire, vous penserez génie et triche en même temps. Si vous pensez Braves et victoire, vous penserez domination et déception. Chaque franchise a offert une voie à suivre à la MLB pour finalement décevoir derrière. Les Astros ont triché et les Braves n’ont gagné qu’un titre avec la meilleure rotation de l’histoire. Impact aussi positif que négatif de chaque côté. Egalité.

La classe à Dall… à Houston.

Poids économique

Houston Astros : Avec leur succès, les Astros ont bondi de la 13ème à la 10ème au classement Forbes en 2019, avant de retomber à la 12ème place en 2021, avec une valeur marchande de 1,8 milliards de dollars, juste derrière les Braves, à quelques millions près, les Nationals ayant pris le 10ème rang.

Avant la pandémie, ils étaient devenus la 6ème franchise MLB en termes économiques, avec aussi la 6ème masse salariale des Majeures. Autre donnée clé : en 2013, Houston avait la 27ème affluence au stade en MLB. En 2019, les Astros se classent 9ème. Un bond de géant. Les chiffres sont en recul pour 2021 : effet covid et/ou effet scandale ? A voir. Les Astros ont acquis une nouvelle stature en MLB, élargissant leur fanbase, mais le scandale de triche en a fait aussi l’une des équipes les plus détestées. Cela peut avoir des conséquences sur leurs finances.

Atlanta Braves : La franchise de Géorgie se situe au 11ème rang du classement Forbes 2021 sur les équipes MLB ayant le plus de valeur marchande, juste devant les Astros. Les Braves ont toujours été dans le haut du deuxième tiers. C’est une valeur sûre de la MLB sans pour autant pouvoir titiller le haut du panier. Il en est de même pour le public au stade où l’équipe se situe encore dans le haut du deuxième tiers.

Résultat : Nouvelle égalité. Des équipes très proches en terme de poids économique, avec des logos et des noms qui voyagent bien. Mais pas autant que ceux du top 5 que sont les Yankees, Dodgers, Red Sox, Cubs et Giants. Un cran en-dessous clairement. Les Astros limitent la casse pour le moment dans ce match.

Impact dans la culture populaire

Houston Astros : La franchise n’a pas spécialement brillé au cinéma ou dans la littérature. Mais les Astros ont pour eux deux aspects positifs : des maillots cools et une mascotte cool. Demi-finaliste de notre Mascot Madness en NL, Orbit est l’une des mascottes les plus connues, les plus emblématiques et les plus drôles de la MLB et du sport mondial tout simplement.

Les pitreries d’Orbit font régulièrement le tour de la Terre grâce à Internet. Pourtant, débarquant en 1990, il finit une première fois sa carrière en 1999. En 2000, il est remplacé par Junction Jack alors que les Astros quittent l’Astrodome pour le Enron Field. Un scandale. D’ailleurs, Orbit revient en 2012 pour notre plus grand bonheur.

Et les maillots ? On parle bien entendu des maillots de la Rainbow Era à partir de 1975 et jusque dans les années 80 qui sont parmi les plus marquants et les plus sympas de l’histoire de la MLB, devenant un référent des Astros dans la culture populaire américaine.

Côté négatif : le scandale, encore et toujours. Depuis novembre 2019, les Astros ont rejoint les Black Sox de 1919 et la Steroïd Era dans le top 3 des grands scandales de triche de la MLB. Ils ont même réussi, brièvement, à devenir plus haïs que les Yankees. Ils continuent de cliver depuis. Une victoire en 2021 atténuerait l’infâmie mais il est clair que le scandale a marqué les esprits et donc les mémoires. Et le baseball ne manque pas de mémoire.

Atlanta Braves : Les Braves ont eu plusieurs vies et chacune a apporté son lot de légende. A Boston, en 1914, ils deviennent les Miracle Braves, l’un des plus gros upsets de la longue histoire de la MLB, à l’instar des Miracle Mets de 1969. Horribles en 1913 et derniers à mi-saison 1914, ils reviennent des enfers pour gagner la NL et sweeper les A’s de Philadelphie, archi-favoris, en World Series. Puis, à Milwaukee, en 1957, ils remportent les World Series en sept matchs face aux terribles Yankees. Ils seront, avec les Dodgers et les Giants, l’une des trois équipes à priver de titre les Yankees durant cette décennie. Une performance !

Enfin, à Atlanta, comme vu plus haut, ils vont connaître près de 15 ans de quasi-domination en NL avec un titre en World Series. Une période qui reste gravée dans les mémoires pour leur incroyable et unique rotation d’élite. Sans compter l’épisode de légende quand Hank Aaron bat le record de homeruns en carrière de Babe Ruth au début de la saison 1974, après avoir subi insultes racistes et menaces de mort durant la saison 1973. Un épisode à la fois sombre et lumineux de l’histoire américaine post-ségrégation. Un épisode iconique.

Les Braves sont aussi célèbres pour leur fameux Tomahawk Chop, un chant d’inspiration amérindienne que les fans ont popularisé à partir de 1991 et durant toute cette période faste pour la franchise. Il est devenu aujourd’hui l’une des chansons de fans les plus célèbres du baseball. Mais, comme le nom de la franchise, il est devenu controversé en tant que symbole de la réappropriation culturelle d’un peuple opprimé (voir notre article sur le sujet).

On notera également la célèbre animation The Freeze, depuis 2017, qui met en scène un mystérieux coureur du même nom face à un fan, animation présente aux London Series 2019. Les Braves sont aussi le cadre sportif du film Une Nouvelle Chance (2012, Trouble with the curve en VO) de Robert Lorenz, avec Clint Eastwood, Amy Adams, Justin Timberlake et Robert Patrick. Clint Eastwood y joue l’un de leurs recruteurs.

Résultat : Les Braves conquièrent une nouvelle victoire dans ce face à face. Les Astros ont acquis une sacrée importance dans la culture populaire avec le scandale mais sans que cela soit glorieux. Les Braves ont aussi leur part sombre, avec leur nom et le Tomahawk Chop. Cependant, ils ont aussi des moments iconiques de l’histoire du baseball et de l’histoire américaine.

Verdict

A date de création égale, ces deux équipes du sud des Etats-Unis auraient peut-être eu un match plus équilibré mais, grâce à leur ancienneté, les Braves l’emportent assez aisément. Comment lutter contre une franchise présente pour les débuts du baseball pro et ayant comme franchise player l’un des cinq meilleurs joueurs de tous les temps ? Les Trashtros se sont fait marteler. Est-ce que ce sera aussi le cas en World Series ou vont-ils sortir des poubelles de l’histoire pour gagner au buzzer ? Réponse début novembre.

 

Pour en savoir plus sur ces deux franchises, nos deux épisodes qui leurs sont consacrés :

En Toute Franchise 12 – Braves

En Toute Franchise 15 – Astros

Over the rainbow

Crédit photo en Une : Getty Images


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