Double interview de Ririka Ito et Toshihiro Kuriyama :  » La Super League Softball est vraiment un bon système »

Les 1er et 2 juillet derniers, s’est tenu le dernier week-end de la Super League Softball, une compétition féminine qui faisait ses débuts en 2023. Ce nouveau format, lancé par la Direction Technique Nationale et la Fédération Française de Baseball, s’est déroulé sur trois week-end chez les Pharaons d’Evry. Pour clôturer en beauté cette première édition, la Super League Softball a accueilli quatre invité.e.s de prestige, le manager et trois joueuses du club professionnel japonais, l’Ogaki Minamo Softball Club, membre de la Japan Diamond Softball League : Toshihiro Kuriyama (manager), Marin Asai (lanceur, ancien internationale junior), Miyu Nagai (receveuse) et Ririka Ito (champ extérieure).

Photo de groupe lors du dernier week-end de la Super League Softball 2023 – crédit photo : David Moret

A l’issue du dernier match, nous avons pu interviewer Toshihiro Kuriyama et Ririka Ito, grâce à l’aide de leur interprète du week-end, Daïki Mauclaire, que nous remercions chaleureusement. Cela donne l’occasion, à TSO, d’avoir l’avis de professionnels sur le softball féminin français et d’en apprendre un peu plus sur la réalité du softball au Japon.

Quelles sont vos impressions sur le softball français après avoir vécu ce week-end de la Super League Softball ?

Ririka Ito : J’ai trouvé qu’il y avait beaucoup d’émotion dans le softball français parce que quand ça va bien, tout le monde est content, tout le monde encourage à fond et quand ça va pas, tout le monde déprime ensemble. Il y a cette vague là qui n’existe pas au Japon, où tout le monde ne fait pas trop de bruit, c’est vraiment calme, donc je me suis beaucoup amusée tout le long du week-end.

Toshihiro Kuriyama : Ça fait depuis 2018 que je viens en France (le club et la FFBS travaillent ensemble depuis plusieurs années, permettant, par exemple, à l’international Clélia Costes de s’y entraîner en février dernier. La Pacific Industrial Co, sponsor du club a également sponsorisé la SSL, ndlr) et je vois les joueuses évoluer. Elles ont progressé à chaque fois que je suis venu. J’en suis très heureux. Elles peuvent devenir encore meilleures mais pour ça, il faut qu’elles soient plus sérieuses, plus rigoureuses dans leurs entraînements. C’est ce qui leur manque.

Toshihiro Kuriyama – crédit photo : David Moret

Que pensez-vous de ce format de la Super League Softball ?

Ririka Ito : Je pense que c’est très bien parce que, au-delà de la performance d’équipe qu’on a pendant la saison régulière, ça permet de pousser chaque chaque joueuse dans le perfectionnement. Comme il y a les points individuels (la Super League Softball repose sur un classement individuel avec des actions qui apportent des points comme les strikeouts ou les hits, ndlr), on est obligé de performer pour gagner des points. Donc c’est bien de gagner en équipe. Mais là justement, ce qui fait la différence, c’est que chaque joueuse doit arriver à frapper. C’est ce qui fait que c’est une bonne ligue.

Toshihiro Kuriyama : Je pense aussi que c’est une très bonne chose parce que justement, ça leur permet de se focaliser vraiment sur leur individualité, dans le jeu, c’est à dire ne pas ne pas jouer au softball comme d’habitude en équipe ou s’appuyer sur les autres. On se focalise vraiment sur chaque jeu à la fois. On est obligé de se concentrer parce qu’une erreur, ça nous coûte des points, se faire retirer ça nous coûte des points. Donc je pense que c’est vraiment un bon système.

Vous avez commencé déjà à répondre mais, pour aller plus loin, quelles sont les forces et faiblesses des joueuses françaises ?

Ririka Ito : Pour ce qui est des forces, je pense que c’est le côté où elles sont capables de s’adapter, de jouer plusieurs positions, de remplir les trous de l’équipe. C’est vraiment une force parce qu’au Japon justement, on a un poste fixe et quand il manque des joueuses, il va falloir mettre quelqu’un qui n’a pas du tout d’expérience à ce poste et ce n’est pas évident. Et pour ce qui est des faiblesses, c’est le rythme du jeu. La prise de décision est beaucoup plus lente que dans les grands pays du softball. Par exemple, en défense, c’est le timing dans lequel elles vont faire leur relance, c’est-à-dire qu’elles regardent le jeu et après elles relancent. Elles ne réfléchissent pas tout de suite à ce qu’elles doivent faire. Pareil sur base. Les coureuses prennent beaucoup de temps à prendre leur décision avant de partir. C’est ça, la plus grosse faiblesse.

Ririka Ito – crédit photo : Amanck Photographies

Toshihiro Kuriyama : Le bon côté, c’est vraiment le fait qu’elles soient souvent positives, qu’elles aient beaucoup d’énergie et qu’elles donnent tout à chaque fois sur le terrain. Ce qui leur manque, c’est les bases. En fait, c’est l’entraînement quotidien, le fait de répéter toujours la même chose, de faire les petites choses, et c’est de cela qu’elles ont le plus besoin.

Quelle est la place du softball féminin, dans un pays très baseball, mais aussi où le football est très fort maintenant, notamment le football féminin ?

Toshihiro Kuriyama : Le softball, d’une manière générale, est très populaire car on y joue depuis tout petit jusqu’à un âge avancé. Beaucoup de personnes y jouent mais, pour ce qui est de la compétition, du softball en balle dure, là, c’est beaucoup moins populaire, avec moins de joueurs, parce qu’il y a ce côté compétitif et que les débouchés sont compliqués. Il n’y a que le monde professionnel où on peut avoir un avenir. Puis, la difficulté, c’est d’arriver à se relever du covid. Actuellement, on n’arrive pas à retrouver un niveau où on aurait autant de public qu’avant la période covid. Donc, pour le moment, on essaie de se relever et de développer la discipline petit à petit.

Quelle est le parcours classique pour devenir joueur professionnelle ? Par quelles étapes passe-t-on ?

Ririka Ito : Généralement, les joueuses jouent à fond jusqu’au lycée (contrairement au sport français, basé sur un système associatif, les jeunes athlètes du Japon jouent et se développent principalement dans le cadre du sport scolaire, ndlr) et les meilleures vont être sélectionnées directement dans la ligue professionnelle (la Japan Diamond Softball League depuis 2022, évolution de la précédente ligue, la Japan Softball League, ndlr). Et celles un peu moins bonnes vont en universitaire pour essayer de se faire remarquer et les meilleures universitaires sont également sélectionnées par la ligue. C’est le parcours classique.

Est-ce qu’il y a une sorte de Koshien version softball féminin ?

Ririka Ito : Ce n’est pas du niveau du Koshien mais il y a l’Inter-High (ou inter-lycée en français, ndlr), où il y a les représentants de chaque région, soit chaque équipe qui remporte son championnat régional va ensuite représenter sa région au championnat national. C’est l’objectif de tous les lycées.

Merci Ririka et Toshihiro d’avoir répondu à nos questions.

Merci à Daïki pour la traduction ainsi qu’à Franck Péan et David Moret pour les photographies.

Daïki Mauclaire et Toshihiro Kuriyama lors du discours de clôture de la SLS 2023. « Vous avez kiffé ? » demande le manager japonais en français aux joueuses et au public – crédit photo : Amanck Photographies

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