Preview 2024 – Philadelphia Phillies : Le mois d’octobre leur va si bien

Il y a un an à cette même période, le monde du baseball était en pleine effervescence avec la perspective de la World Baseball Classic et le début de la saison MLB. Et on peut dire que l’année 2023 nous a régalés entre le titre du Japon d’Ohtani face à Team USA, le retour des London Series et la première victoire en World Series des Texas Rangers. Nous avons eu droit à notre lot d’émotions, de beau jeu, de surprises, de déceptions, de rencontres, d’au-revoir (bye-bye Waino et Miggy)… et nous voilà déjà au départ de la saison 2024! Même sans compétition internationale à venir (il faudra attendre 2028 pour revoir le baseball/softball au programme des JO), on a hâte d’entendre PLAYBALL. Et pour tout savoir de cette saison MLB qui approche aussi vite qu’une balle lancée par Nolan Ryan, la rédac de The Strike Out vous propose sa traditionnelle série de previews. Parlons aujourd’hui des Phillies, trop justes pour dominer la saison régulière, mais contenders légitimes pour la victoire finale.

Fraichement auréolés d’un titre de Champion de National League, mais battus par des Astros intouchables lors des World Series, les Phillies rêvaient de retenter leur chance lors du Fall Classic, et de remporter le trophée cette fois. Il s’en est fallu de peu, puisque les Phillies menaient 3-2 lors de leurs NL Championship Series contre les Diamondbacks, avec deux matchs à domicile pour conclure. Et puis le rêve s’est envolé. Mais, si la fin de l’histoire est amère pour les supporters de Philadelphie, les hommes de Rob Thomson ont confirmé leur incroyable capacité à enclencher le « Beast Mode » en postseason. S’ils n’ont pas la capacité à suivre le rythme infernal des Braves lors de la saison régulière, Harper et compagnie les ont éliminés deux fois en deux saisons, chaque fois en NLDS, chaque fois au sortir d’une Wild Card maitrisée.

Entendons nous bien, si les Phillies n’ont tout simplement pas la capacité à suivre le rythme des Dodgers ou des Braves sur les 162 matchs de la saison régulière, n’allons pas non plus minorer leur niveau général. Le front office a travaillé dur pour gommer les déficits structurels de la franchise, et notamment le bullpen qui fut longtemps son point faible évident, la rotation est ancrée autour de deux véritables talents tout comme le lineup, mené par Harper, Turner et Realmuto… même si tout ne s’est pas passé entièrement comme prévu pour ces trois-là.

Bryce Harper, tout d’abord, n’a commencé la saison qu’en mai après avoir subi une opération Tommy John en Novembre 2022, au sortir d’une postseason monumentale. Cantonné dans un rôle de DH puis placé au premier but, il a vite retrouvé le rythme pour confirmer son statut de leader offensif des Phillies. Une Slash-line de .293/.401/.499 plus tard, avec 21 HR et 29 doubles, et un OPS+ de 146 pour faire bonne mesure Bryce Harper est indestructible, et en a profité pour prendre une place d’honneur au classement du MVP (12e) en seulement 126 matchs, avant de confirmer son rôle de Clutch Leader en postseason, malgré la douleur (les 2 HR dans le Game 3 contre les Braves resteront dans la mémoire collective du Citizens Park). Pour Realmuto et Turner, le tableau est moins joyeux : J.T Realmuto, en plus d’avoir vu son titre honorifique de « meilleur catcher de MLB » s’envoler vers Baltimore, a connu une saison juste moyenne au vu de ses standards : baisse de régime à la moyenne, moins de walks, plus de strikeouts, un OBP qui devient inquiétant (.310). Il a bien frappé 20 HR et son bras reste impérial défensivement, mais le Realmuto impérial semble avoir pris une année sabbatique. Passage à vide ou véritable déclin, on en reparle dans un an. Même topo pour Trea Turner. Il n’a pas été foncièrement mauvais en 2023, mais on en attendait plus qu’une moyenne de .266 (.296 en carrière) et un OBP de .320, lui dont le jeu repose en grande partie sur la vivacité et la présence sur bases. Alors certes il a tapé 26 HR (pour 76 RBI) et a tout de même volé 30 bases, mais on ne peut s’empêcher de penser que l’approche « True Outcomes » des Phillies bride son jeu.

Bryce « Robocop » Harper, a réalisé une saison monumentale, avec un coude en convalescence.

Mais, vous l’aurez compris, c’est surtout une question d’exigences tant l’on attend, chaque saison, monts et merveilles de ces deux joueurs. Pour d’autres, comme les outfielders Kyle Schwarber et Nick Castellanos, on accepte plus facilement les stigmates de l’irrégularité, quitte à être positivement surpris : avec 47 HR  et 104 RBI (pour un AVG de .197, bien entendu), Schwarber a réalisé une saison conforme à ses standards de surpuissance sans qu’on ne lui en demande bien plus. Castellanos, quant a lui, a su combiner puissance et moyenne  pour finir avec 29 HR, 106 RBI  et .272 au bâton. Tous les deux ont été récompensés par une place au classement du MVP (19e et 23e), et une convocation au All-Star Game pour Schwarber. Troisième larron du champ extérieur, le Champ Centre Brandon Marsh a réalisé une bonne saison, apportant sa pierre à l’édifice sans faire trop de bruit (.277, 43 XBH, 127 OPS+).

Dans l’infield, outre Realmuto, Turner et Harper donc, rien de bien remarquable mais du solide. Alec Bohm (.274, 20HR, 97 RBI) et Bryson Stott (.280, 31 SB) ont fait le taf, Edmundo Sosa a surnagé tandis que Kody Clemens a connu une deuxième saison tout aussi pénible que la première (chez les Tigers), jouant une cinquantaine de matchs principalement au poste de 1B avant que Bryce Harper ne s’y installe. Ça se complique pour l’héritier qui devrait commencer sa troisième saison de Major Leaguer en Triple A.

Du bon boulot dans le lineup avec une attaque dans le premier tiers de la National League et de la MLB dans la plupart des catégories offensives dont les Runs, les Home Runs, la moyenne ou la présence sur base. Seul petit « accroc », les Phillies sont aussi dans le haut de tableau en termes de Strikeout subis mais ça, on s’en doutait un peu. Et le tableau est similaire côté lanceurs, pour des Phillies qui a défaut de rivaliser sur la durée avec les monstres de la Ligue, ont le mérite de ne pas avoir de véritables points faibles : 4e ERA Collectif de NL (4.03), 3e en nombre de Strikeouts, 1er et 3eme de MLB en termes de manches lancées par les partants (899) et, tiens, parlons en des partants :

Les Phillies ont la chance de pouvoir s’appuyer sur un 1-2 punch plus qu’établi désormais, puisque Zack Weeler et Aaron Nola se sont partagés le rôle d’as de la franchise depuis 2020 et l’arrivée de l’ancien Met en Pennsylvanie : depuis, ils cumulent cinq top 12 au Cy Young, 1088 manches lancées (avec une saison de 60 matchs), un ERA de 3.52 et un K/9 de 10.084… En quatre ans avec des hauts et des bas. Redoutables mangeurs d’innings (193.2 et 192 en 2023 respectivement), quasi incassables, ils sont la caution d’excellence des Phillies. Pour les accompagner en 2024, Rob Thomson a pu compter sur deux autres joueurs bien aguerris aux joutes de Major Leagues, avec le toujours fiable Taijuan Walker ( 172.2 IP, 4.38 ERA) ainsi que Ranger Suarez (125 IP, 4.18 ERA). Mais on a aussi découvert le potentiel de starter de Cristopher Sánchez, qui jusque là n’avait eu qu’un temps de jeu limité en sortie de bullpen. En 19 sorties dont 18 départs, Sánchez s’est offert une très belle saison avec un ERA de 3.48 en 99.1 IP, et ses deux premiers matchs à 10 Strike Out en Septembre pour couronner une saison plus que convaincante. A revoir sur la durée !

Et pour finir, le bullpen a tenu son rôle, rabattant en brèche l’idée (justement) établie que les Phillies étaient incapables d’articuler une relève digne de ce nom. Menés par un Craig Kimbrel toujours efficace (3.26 ERA, 69 IP, 94 SO, 23 SV, All Star) en saison régulière mais en grande difficulté lors des Championship Series (deux défaites qui ont couté cher), les Phillies ont pu compter sur un solide trio Alvarado (41.1  IP, 1.74 ERA, 10 SV), Hoffman (52.1 IP, 69 SO, 2.41 ERA) et Soto (60.1 IP, 65 SO) pour manger les manches de fin de match tandis que Matt Strahm alternait les débuts de matchs en tant qu’Opener et les passages en relève pour une fiche solide de 87.2 IP pour un WHIP de 1.015, un ERA de 3.29 et 108 Strike Outs. Avec quelques autres bras tels que ceux de Seranthony Dominguez, Michael Lorenzen ou encore Bailey Falter, les Phillies avaient finalement un bullpen digne de ce nom, jusqu’au moment le plus important de la saison…

Alors, la suite ?

On va faire simple, il n’y aura pas de grand chambardement dans le roster des Phillies en 2024. Le lineup titulaire est quasiment identique à celui qui est allé chercher la Wild Card l’an dernier avec Realmuto derrière le marbre, Harper,  Stott, Bohm et Turner pour compléter l’infield et un outfield composé de Marsh, Castellanos et Johan Rojas, attendu de retour comme le titulaire au champ centre. Statu quo donc, ou presque, puisque les Phillies ont tout de même recruté un Free Agent de choix en la personne de Whit Merrifield, dont la polyvalence et la carrière de triple All-Star seront sans aucun doute très précieux au moment de gérer une crise, trouver la solution à un slump ou une blessure, ou tout simplement guider l’équipe dans les moments difficiles.  Autre option notable sur le banc, les Phillies disposeront de l’ex top prospect des Braves, l’Outfielder Christian Pache, dont l’on attend toujours l’éclosion au plus haut niveau, ainsi que de l’infielder polyvalent Edmundo Sosa.

Ranger Suarez, Aaron Nola et Zack Wheeler seront encore les fers de lance de la rotation des Phillies en 2024

Pas non plus de véritable changement chez les lanceurs partants puisque, sauf blessure, les 5 principaux resteront Wheeler, Nola, Suarez, Walker et Sánchez, en attendant peut être de voir le Top Prospect Mick Abel arriver en cours de saison. Il faudra attendre, en revanche, pour observer les premiers pas de l’ancien 13e choix de la Draft 2021 et prospect numéro 1 des Phillies : Andrew Painter a subi une opération Tommy John en juillet dernier et ne devrait pas lancer en 2024. Statu quo aussi, ou presque pour le bullpen, puisque seul le départ de Craig Kimbrel a été compensé par l’arrivée de Spencer Turnbull, un choix intéressant puisqu’un lanceur qui n’a jamais connu la relève vient remplacer l’un des meilleurs releveurs de sa génération. Mais Turnbull, qui a connu une reprise cauchemardesque en 2023 (31 IP, 7.26 ERA) pour son retour après une opération Tommy John en 2021, trouvera peut-être là l’occasion de retrouver son stuff avant de pouvoir relancer sa carrière de starter ou, qui sait, s’offrir une deuxième vie dans la peau d’un releveur. Pour le reste, le bullpen restera très similaire à celui de l’an dernier, avec Jose Alvarado comme héritier naturel du poste de closer, bien entendu.

Parmi les départs, hormis Kimbrel, on notera ceux de Corey Knebel et Rhys Hoskins, blessés et absents de la saison 2023, ainsi que celui de Michael Lorenzen. La continuité donc, et pourquoi changer un effectif qui pour la deuxième fois en deux ans a su atteindre la postseason et y briller ? Recruter quelques stars aurait pu permettre de se mettre a l’abri plus tôt, certes, voir même d’aller titiller des Braves qui semblent encore bien seuls au sommet de la Division NL East. Mais, on le sait, le baseball n’est pas une science exacte, et on peut difficilement reprocher au GM des Phillies Dave Dombrowski de jouer la continuité sur un effectif qui allie à la fois jeunesse, expérience, et un état d’esprit absolument remarquable au moment où les joueurs clutch sont attendus au marbre. Aucune raison de ne pas voir les Phillies en bonne position pour la Wild Card, une fois de plus, quand le sprint de Septembre touchera à sa fin.

Pur produit du Farm System des Phillies, qu’il a rejoint en 2018 lors de la draft internationale, Johan Rojas a passé six ans dans les rosters mineurs de la franchise avant d’avoir sa chance, soudainement, quand une blessure de Christian Pache lui a ouvert les portes des Ligues Majeures. Il y avait une opportunité à saisir pour le centerfielder dominicain, et il ne s’est pas fait prier. En 59 matchs, l’outfielder a frappé confortablement à plus de 30% , volant 14 bases au passage avec une défense de niveau élite (1.7 WAR Défensif pour Baseball Reference, 15 DRS pour Fangraphs, en moins de 60 matchs rappelons le !).

Johan Rojas a encore un certain déficit de puissance, certes, et ne marche que très peu, mais le potentiel est là, avec un œil pour le contact, des jambes de feu et un bras comme un canon sur l’une des positions les plus importantes défensivement. Gardez ce nom en mémoire car, tant que la production offensive continuera d’être suffisante, Johan Rojas pourrait bien s’imposer comme l’un des jeunes joueurs les plus intéressants des Ligues Majeures à son poste, et un potentiel Gold Glover dans l’outfield dès 2024 !

Qui d’autre, d’années en années, que le futur Hall of Famer Bryce Harper pour s’imposer comme le visage, l’âme, la star des Philadelphia Phillies. Loin, bien loin du Harper sale gosse des Washington Nationals, le Bryce Harper trentenaire des Phillies est un exemple d’attitude, un leader sur le terrain et en dehors, et le joueur clutch par excellence dans les moments les plus chauds, comme lors des Division Series gagnées contre les Braves en Octobre dernier. Des séries où Harper aura frappé à 50% avec 3 Home Runs et un OPS de 1.765 contre la meilleure équipe de saison régulière, que l’on pensait quasiment intouchable.

Déjà monstrueux lors de la postseason 2022, tirant son équipe vers les World Series malgré la douleur, Bryce Harper a du passer par la case Tommy John avec un coude défaillant. On l’attendait en juin, il est revenu en mai avec une attelle au bras, on ne l’attendait pas ailleurs qu’en DH, il s’est construit un futur de joueur de première base qui, admettons-le, lui convient probablement plus défensivement que celui de Right-Fielder où il était un défenseur quelconque. Bryce Harper, en bon kid de Las Vegas, a un petit quelque chose de Nicky Santoro (Casino, Martin Scorcese), il se relèvera toujours, et alors vous n’aurez pas intérêt à le rater, parce que lui ne ratera pas son opportunité.

Clairement l’un des meilleurs joueurs des Ligues Majeures sur la deuxième partie de 2023, alors même qu’il n’était pas encore complètement rebranché, Bryce Harper a faim et 2024 est l’année idéale pour un troisième titre de MVP. Et si j’étais vous, je n’irai pas m’aventurer à parier contre le slugger de Vegas.

Je l’ai répété quelques fois en fil rouge de cette preview, les Braves sont et restent largement au-dessus de la Division NL East sur la durée d’une saison régulière, et il faudrait non pas un cataclysme mais véritablement une série d’évènements hautement improbables pour que cela change cette année, tant Atlanta, comme les Dodgers, semble loin au dessus du reste de la National League. Mais, dans le grand vide qui suit ces deux équipes, il n’y en a une qui semble posséder à la fois le talent, l’expérience et un track record idéal pour atteindre les playoffs sans souffrir et devenir l’outsider numéro 1 de la postseason. Et cette équipe, c’est bien entendu les Phillies de Rob Thomson et Bryce Harper.

Aucun doute qu’on les retrouvera, à nouveau, dans le haut du panier. Avec peut-être l’opportunité d’aller enfin chercher ce rêve impossible en World Series ?  Une fois en Octobre, tout est possible au Citizens Park !

Mon pronostic : 2e de NL East, 94-68, Wild Card

Trea Turner a finalement digéré l’énorme contrat (11 ans, $300M) qu’il a signé avant la saison 2023 avec les Philadelphia Phillies, et le dragster floridien est de retour sur les sentiers de Major Leagues. De retour à son niveau de 2021, Turner embarque le batting title de National League au nez et à la barbe de Luis Arraez, et se tire la bourre avec Ronald Acuna Jr. jusqu’au bout dans la course au vol de bases. .330+ average, 50+ buts volés, 30 HR, 100 RBI et Turner est bien présent dans la course pour le titre de MVP de National League.


Laisser un commentaire