
Il y a un an à cette même période, le monde du baseball était en pleine effervescence avec la perspective de la World Baseball Classic et le début de la saison MLB. Et on peut dire que l’année 2023 nous a régalés entre le titre du Japon d’Ohtani face à Team USA, le retour des London Series et la première victoire en World Series des Texas Rangers. Nous avons eu droit à notre lot d’émotions, de beau jeu, de surprises, de déceptions, de rencontres, d’au-revoir (bye-bye Waino et Miggy)… et nous voilà déjà au départ de la saison 2024! Même sans compétition internationale à venir (il faudra attendre 2028 pour revoir le baseball/softball au programme des JO), on a hâte d’entendre PLAYBALL. Et pour tout savoir de cette saison MLB qui approche aussi vite qu’une balle lancée par Nolan Ryan, la rédac de The Strike Out vous propose sa traditionnelle série de previews. On visite aujourd’hui PNC Park, et des Pirates qui ne semblent plus très loin de pouvoir enfin lâcher les amarres.
Retour sur 2023
A première vue, on pourrait penser que 2023 n’a été rien qu’une saison de plus sans éclaircie du côté de Pittsburgh. Une huitième saison consécutive sans postseason, le cinquième bilan négatif en autant d’années, et une quatrième place en NL Central devant, seulement, les effarants Cardinals…
Mais, pour la première fois depuis longtemps, très longtemps, les motifs d’espoirs semblent commencer à prendre le dessus sur la fatalité. Déjà parce que les 76 victoires obtenues sont un progrès spectaculaire par rapport aux 61 et 62 réussies en 2021 et 2022 respectivement. Mais aussi parce que cet effectif commence à prendre forme, comme le signe d’un rebuild qui entame sa dernière phase.
Les supporters des Pirates ont notamment pu apprécier le début de saison de Mitch Keller, qui a tenu la comparaison avec les meilleurs lanceurs des Majors pendant deux bons mois avant de rentrer dans le rang ensuite, à l’image de son équipe. Convoqué au All-Star Game, il finit la saison avec 194.1 manches lancées (8e de MLB), un ERA de 4.21 (3.80 FIP) et 210 strikeouts (10e de MLB). Il a été bien accompagné par Johan Oviedo (4.31 ERA, 177.2 IP, 158 SO) tandis que le reste de la rotation se cherche encore (Luis Ortiz n’a pas été flamboyant, Roansy Contreras franchement décevant tout comme Quinn Priester, qui cherche encore ses marques au niveau majeur). Mais on reviendra sur ce sujet dans la prochaine partie.
Plus encore que Keller, David Bednar a été l’une des grandes satisfactions de la saison pour les Pirates, obtenant sa deuxième visite au All-Star Game avec une saison de très haut niveau : 39 SV sur 42 possibles, un ERA de 2.00 (222 ERA +) et 80 Strike Outs en 67.1 manches lancées : une machine. A ses côtés dans le bullpen, les Moreta, Holderman, Borucki n’ont pas démérité, sans pour autant être extraordinaires, mais là aussi le manque de profondeur fut flagrant en 2023.
L’ERA collectif du pitching staff des Pirates illustre un peu ce bilan : 22e de MLB (4.60), 24e pour les starters (4.88) et 19e pour les releveurs (4.27). C’est mieux qu’en 2022, mais la route est encore longue.

Côté lineup, même thématique avec, là encore du talent, des prospects qui grattent du temps de jeu, un manque de profondeur et d’expérience et au final un niveau de performance tout à fait ordinaire. Si les Pirates sont vers le fond de la National League en termes de runs marqués et de Home Runs, ils ont fait parler leur vitesse sur bases puisqu’ils sont cinquièmes en doubles et troisièmes en triples. Toujours décevants à la moyenne (.239, 13e), ils restent bien calés en milieu de tableau pour les Walks et les Strike Outs avec, là aussi, un roster qui continue à se mettre en place.
On notera les 26 HR et 74 RBI de Jack Suwinski, qui s’impose comme un élément solide de l’Outfield des Pirates après une année de Rookie délicate. Bryan Reynolds (.263, 24 HR, 84 RBI), quant à lui, a posté une nouvelle saison solide malgré les rumeurs de départ précédant la saison, et Ke’Bryan Hayes, en plus de réaliser une saison solide au bâton (.271 avec 31 doubles et 7 triples pour 61 RBI), a détrôné Nolan Arenado, décuple tenant du titre, pour s’offrir son premier Gold Glove au poste de troisième base. Gageons que ce ne sera pas le dernier. Si les blessures le laissent tranquille, le verra-t-on enfin devenir la superstar annoncée en 2024 ?
On notera également dans le désordre : le début de saison de quasi-MVP de Connor Joe, l’absence regrettée de O’Neil Cruz victime d’une fracture du péroné dès le 9 avril et absent pour le reste de la saison, les débuts sensationnels et émouvants de Drew Maggi après 13 années dans les Ligues Mineures, et le retour sur ses terres d’Andrew McCutchen avec une fiche 2023 plus que respectable (.256, 100 hits et 43 RBI) même si le temps de sa saison de MVP 2013 semble bien loin.
Oh… et puis il y a un petit détail supplémentaire : en juin 2023, les Pirates ont choisi le lanceur de Louisiana State University (LSU), Paul Skenes, avec le premier pick de la Draft. On y reviendra très bientôt !
Qu’attendre de 2024?
On le disait au début de cet article, la jeunesse va continuer à prendre le pouvoir du côté de Pittsburgh, et le front office des Pirates n’en finit plus d’appeler des jeunes de Ligue Mineures, du cru ou tradés, dans le roster MLB, eux qui avaient déjà l’effectif le plus jeune des Big Leagues en 2023 (26,1 ans de moyenne).
On devrait notamment revoir dans le lineup le receveur Henry Davis, premier choix de la Draft 2021 et qui a fait des débuts en demi-teinte en 2023. Il sera desormais attendu comme l’un des fers de lance de ce groupe. On attendra également beaucoup du surpuissant O’Neil Cruz, désormais totalement remis de sa blessure, ou encore de Jack Suwinski qui fait presque office de vétéran avec deux saisons dans le Show.
On observera également la bataille pour le poste de deuxième base entre Liover Peguero (23 ans), Jared Triolo (26 ans), Nick Gonzales (24 ans, 7e pick de la Draft 2020) et Ji-Hwan Bae (24 ans) : quatre joueurs à gros potentiel pour un seul poste. Et il y a encore du monde qui pousse derrière dans le farm system, même s’il est beaucoup trop tôt pour envisager une arrivée dans le Show de Termarr Johson (4e pick de la Draft 2022).
Tout ce petit monde devrait être rejoint, dans le lineup par le vétéran Andrew McCutchen, l’un des seuls trentenaires de cet alignement (avec Yasmani Grandal, désormais backup catcher en attendant le retour d’Endy Rodriguez, blessé au coude et absent pour toute la saison, et Connor Joe, l’Utility Player de luxe des Pirates, qui devrait démarrer le plus gros des matchs sur le banc), les valeurs sûres Bryan Reynolds et Ke’Bryan Hayes et deux recrues : Rowdy Tellez a signé un contrat de $3.2 millions sur un an et occupera le premier but en 2024, tandis qu’Edward Olivares, acquis dans un trade avec les Kansas City Royals cet hiver, rejoindra l’outfield. Un infielder puissant et un outfielder frappeur de contact, et tous les besoins sont couverts.

Beaucoup de jeunes donc, et beaucoup de questions, mais on ne peut pas ignorer que ce roster déborde de talents, avec de nombreux joueurs sous contrôle pour 3 ans et plus. Le futur est dans la place, et la fête peut démarrer.
La fête démarrera-t-elle dès l’arrivée dans le show de Paul Skenes ? Le lanceur californien a vécu une saison 2023 monumentale avec LSU et il semblerait qu’il soit préparé pour des débuts en Major League dès 2024, moins d’un an après sa sélection comme premier choix de la Draft (lire plus bas).
En attendant, la rotation pour 2024 prend forme et, même sans Paul Skenes, même sans Johan Oviedo (qui a subi une opération Tommy John en décembre), Mitch Keller va pouvoir compter sur de vrais soutiens et, mieux encore, de l’expérience. Luis Ortiz et Yoensy Contreras devraient encore, pour commencer la saison au moins, faire partie de la rotation des Pirates, et ils seront rejoint par les recrues Martin Perez et Marco Gonzales et leurs carrières déjà bien remplies à 32 ans tous les deux : deux bras fiables, capables de lancer entre 180 et 200 manches sur une saison et garder un ERA sous contrôle autour des 4.00. On gardera tout de même un œil sur Gonzales qui a raté le plus gros de la saison 2023 avec une blessure à l’avant-bras, mais il est attendu dans la rotation dès l’Opening Day.
Si ce n’est pas le cas, et en attendant Skenes, on gardera un œil sur Quinn Priester, s’il peut régler ses problèmes de précision, et sur un autre top-prospect qui pourrait bien s’installer dans la rotation en 2024, en la personne de Jared Jones : drafté en 2020 et utilise en Double et Triple-A en 2023, il a impressionné avec sa balle rapide à 101mph en ce début de Spring Training.
Tout comme Mitch Keller s’est vu offrir deux renforts d’expérience, le closer David Bednar voit arriver un setup man d’expérience pour le soutenir dans les fins de matchs tendues. Il s’agit ni plus ni moins d’Aroldis Chapman, vainqueur de ses deuxièmes World Series en Novembre avec les Texas Rangers, et qui semble avoir retrouvé un souffle de vie loin de New York. Un sacré one-two punch sur le papier, si les Pirates se donnent l’opportunité d’aborder suffisamment de fins de matchs en position de force. Ils seront accompagnés par le solide Colin Holderman, par un autre premier tour de Draft Carmen Mlodzinski, et par le gaucher Ryan Borucki. Bailey Falter et deux anciens des Tampa Bay Rays, Brent Honeywell et Josh Fleming, tous les deux signés en tant que Free Agents en février, chercheront eux aussi à se faire une place dans l’effectif de relève. Tout comme José Hernandez, encore un débutant de la saison 2023.
Du talent donc, de l’expérience aussi, beaucoup d’incertitudes, mais pour la première fois depuis 2018, il y a ce sentiment que si tout se passe bien les 50% de victoires sont possibles… Et à partir de là, la place est faite pour les rêves les plus fous…
La Star : David Bednar
J’aurais pu choisir Ke’Bryan Hayes en espérant la santé, ou Bryan Reynolds mais je l’ai choisi l’an dernier… ou encore Mitch Keller qui s’est montré parmi l’élite des lanceurs partants en 2023. Mais, et même si le poste de releveur est ingrat dans l’appréciation qui en est faite, c’est bien David Bednar qui s’impose comme la star des Pirates, depuis son arrivée discrète en 2021. Recruté chez les San Diego Padres en compagnie d’Endy Rodriguez et en échange, notamment, de Joe Musgrove, il arrivait sans rien avoir montré de son talent (17 manches en deux ans pour un ERA de 6.75).
Et pourtant une fois de retour à Pittsburgh, sa ville natale, la bête s’est réveillée au plus grand bonheur de toute la famille Pirate. Huitième du Rookie of the Year en 2021, All-Star en 2022 et 2023, il affiche sur cette période un ERA de 2.25 (190 ERA+) en 179.2 manches lancées, avec un WHIP de 1.06, 11SO et 2.8BB par 9 manches lancées, et 61 saves en 70 opportunités.
Désormais flanqué de l’un des meilleurs closers de la dernière décennie en tant que set-up man attitré (Chapman), David Bednar n’attend plus qu’une chose : plus de runs de la part de son attaque, plus de situations de sauvetages, et la possibilité de passer un nouveau palier… et pourquoi pas aller titiller les Devin Williams et Josh Hader, entre autres pour le titre de releveur de l’année en National League.
Le joueur à suivre : Paul Skenes
Il ne pouvait pas y avoir d’autre choix ici, tellement Paul Skenes est attendu comme l’un des lanceurs les plus doués de sa génération, après avoir littéralement roulé sur le championnat universitaire l’an dernier.
Vainqueur des College World Series avec LSU, il en a profité pour ramener quelques récompenses individuelles dans sa valise… Toutes les récompenses en fait : lanceur de l’année, joueur de l’année (Dick Howser Trophy) et Most Outstanding Player des College World Series. Et au passage il n’a pas oublié de battre le record de Strike outs sur une saison de NCAA, avec un total final de 209 retraits… en 122.2 manches… soit un SO/9 de 15.3. Ça vous classe le personnage.
Alors bien entendu, il y a un monde entre la NCAA et les Major Leagues, mais les Pirates semblent décidés à l’amener vers le devant de la scène le plus tôt possible. Lui qui – encore fatigué de son parcours universitaire – n’a lancé que 6 manches en Ligues mineures l’été dernier avant d’être mis au repos par sa franchise, est désormais attendu dans le roster en cours de saison 2024 et, même si Ben Cherington a confirmé hier (05 mars) qu’il ne débuterait pas la saison dans le roster, possiblement même dès la mi-avril.
Paul Skenes a fait ses débuts avec les Pirates il y a quelques jours pour son premier match de Spring Training : une manche parfaite face aux Orioles, avec en bonus son premier face à face avec Jackson Holliday, le top prospect des Ligues Majeures… une fastball chronométrée à 102 mph a fait le boulot.
Habituez-vous dès maintenant à la balle rapide surpuissante de Paul Skenes et à son slider ravageur. L’Histoire est en marche, et le show Paul Skenes va bientôt débuter au PNC Park
Le prono
L’heure approche pour cette nouvelle génération dorée des Pittsburgh Pirates. Des années de premiers tours avantageux à la Draft et de trades sur l’avenir se préparent enfin à payer. Les Pirates rentrent maintenant dans la phase la plus difficile du projet : transformer un gigantesque potentiel sportif en succès sur le terrain. Ne vous attendez pas à voir les Pirates devenir des contenders dès cette saison, ils manquent encore pour cela de quelques véritables leaders sportifs qu’il faudra voir émerger ou aller chercher par d échanges, mais les 50% de victoires pourraient être envisageables, en attendant de partir à l’abordage de la postseason d’ici un an ou deux.
Mon pronostic : 80-82, 3e de NL Central.
Le pari fou
Mitch Keller fait une saison entière sur la base de ses premiers mois de 2023, termine avec 200 manches lancées, 200 strike outs et un ERA inferieur à 3 qui lui valent une place sur le podium du Cy Young Award. Dans son sillage, les Pirates s’arrachent pour accrocher une Wild Card et se qualifient pour les Division Series pour la première fois depuis 2013.

